TRIBUNE. La politique du coup de force, irrespectueuse des droits légitimes du peuple Kanak, conduite par le gouvernement ne peut mener qu’à un immense gâchis, s’alarment dans cet appel 56 personnalités.
L’État a imposé que le 3e référendum d’autodétermination se tienne à la date prévue en décembre 2021. C’était aller contre la demande des indépendantistes de le reporter, compte tenu de l’impact du covid et de la période de deuil qui s’en est suivie. En dépit d’une abstention de 57 %, dont une majorité de Kanaks, le gouvernement considère que l’électorat de l’archipel a alors définitivement opté pour une « Nouvelle-Calédonie dans la France ».
Aujourd’hui, il décide de reporter les élections provinciales de 2024 et de modifier la Constitution pour autoriser le « dégel » du corps électoral provincial. Il s’agit d’ouvrir la citoyenneté calédonienne, pas seulement aux natifs – les indépendantistes sont favorables à la pleine application du droit du sol –, mais au terme d’une durée de 10 ans à tous les résidents. Lesquels deviendront électeurs et éligibles pour les assemblées de Province qui déterminent les orientations politiques locales et la composition du Congrès du pays.
Cette imposition d’un « corps électoral glissant », sans un accord politique global négocié entre les différentes parties prenantes, constitue un passage en force de l’État. Celui-ci, une fois de plus, dicte son calendrier en fixant au processus engagé la date butoir du 1er juillet 2024.
C’est revenir sur un élément clé de l’accord de Nouméa, lequel a permis d’engager un processus de décolonisation et de garantir la paix civile au cours de ces trente dernières années.
Une telle politique renoue avec la logique qui a fait de la Nouvelle-Calédonie une colonie de peuplement.