L'association pour la Sauvegarde du Patrimoine du Vouzinois ( ASPV ) organisait vendredi 17 novembre une conférence sur la géographie de la guerre 14-18. Pierre Taborelli, de l'université de Reims porte un regard neuf avec les outils les plus modernes sur les traces de ce conflit centenaire. Il termine une thèse sur "les conditions géographiques et l'organisation spatiale de la zone de front durant la Grande Guerre en Champagne-Ardenne".
En fait, il étudie en géographe les bouleversements liés à la Grande Guerre, en partant de la réalité du front durant le conflit, jusqu'aux traces encore perceptibles aujourd'hui.
La salle du CPR s'est révélée trop petite pour le nombre de personnes intéressées par cette soirée. Le conférencier s'est montré passionné et passionnant, illustrant son propos d'images et d'exemples très concrets. Sa zone d'étude couvre l'ancienne région Champagne-Ardenne, qui a financé une partie du projet.
On a ainsi appris que le méga-cratère de Berry-au-Bac ne date pas de 1915, comme il était couramment indiqué jusqu'à maintenant. Il résulte de l'emploi de 60 à 70 tonnes d'explosif, dans la guerre des mines qui s'est déroulée lors de la stabilisation du front, en particulier entre 1915 et 1918. Le méga-cratère de Berry-au-Bac, mesure 76 mètres de diamètre, et a une profondeur de 22 mètres. Le travail des chercheurs a permis de dater sa création à 1918, lors d'une des dernières grandes offensives dans ce secteur.
Pierre Taborelli et ses collaborateurs ont particulièrement étudié le système des tranchées. Celles-ci sont très fortement liées au conflit 1914-1918, période dans laquelle le front a peu bougé pendant de très longs mois. Ces tranchées mettaient en partie les combattants à l'abri des tirs, en particulier d'artillerie. L'année 1914, avec sa guerre de mouvement et donc des déplacements à découvert pour les troupes, a été très meurtrière avec des journées terribles (plus de 500 000 morts entre août 1914 et janvier 2015).
Les tranchées sont apparues progressivement, à partir du simple trou individuel jusqu'au réseau le plus complexe. Il y a eu 10 000 Km de tranchées et de boyaux sur le 90 Km de front situés en Champagne-Ardenne. Les réseaux étaient le plus souvent constitués de 4 lignes, permettant le repli en cas d'attaque ennemie.
Si les traces sont encore bien perceptibles en zone forestière, du moins au sol, elles sont parfois presque totalement effacées en zone cultivées. Dans ces deux situations, des techniques modernes (utilisant avion et ordinateurs puissants) peuvent permettre de retrouver les localisations des différents ouvrages. Les cartes militaires de l'époque complètent et confirment ces investigations.
En plus de l'intérêt historique, ces travaux ont des implications actuelles. Ils sont très utiles lors de grands chantiers, en permettant de guider les travaux de terrassement en fonction des zones de combats. (zone Farman à Reims).
De nombreux obus chimiques n'ayant pas explosé, la localisation précise des secteurs les plus bombardés permet de définir des zones à risques de pollution des nappes phréatiques.
Une soirée très enrichissante grâce à un conférencier qui a su faire la liaison entre un travail universitaire et une vulgarisation attrayante, et faire également le lien entre les bouleversements créés par le conflit et les conséquences encore perceptibles de nos jours.
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