Tribune publiée dans "Libération" le 19 mars.
Ces dernières semaines, les faits nous reparlent de l’antisémitisme : une hausse de 74 % des actes contre les juifs en 2018 ; des croix gammées sur le portrait de Simone Veil ; des insultes évidemment antisémites à l’encontre d’Alain Finkielkraut ; deux cimetières juifs profanés… Il n’est plus possible de nier la réalité du retour de la haine antijuive. Elle se combine à l’existence d’un racisme structurel qui touche les Roms, ainsi que les populations issues de l’immigration postcoloniale qui subissent de multiples discriminations. De plus, le refus de l’accueil des migrant·e·s participe de ce climat général de xénophobie.
Autour du mouvement des gilets jaunes, des expressions antisémites ont été remarquées, comme l’équation Macron = Rothschild = Sion, significative depuis deux siècles d’un antisémitisme à peine masqué, mais bien réel. Ces faits, s’ils sont inquiétants, demeurent isolés et ne remettent pas en cause les aspirations sociales et démocratiques de ce mouvement.
La gauche de la gauche, peu suspecte d’antisémitisme, a pourtant mis du temps à prendre la mesure de sa montée et se montre fort divisée, comme en témoignent les divers appels lors de la journée du 19 février. D’autre part, une partie non négligeable de cette gauche ne prend en considération les faits antisémites que lorsqu’ils viennent de l’extrême droite. Or, le phénomène est beaucoup plus profond, présent dans diverses couches de la société française. Le complotisme s’y répand, avec ses risques de dérapages antisémites, à l’instar de ce que furent les Protocoles des Sages de Sion de sinistre mémoire.