A l’occasion de la Journée mondiale des réfugiés le 20 juin prochain, Amnesty International France (AIF) rappelle que les réfugiés ont un visage, une histoire et aussi des droits.
La protection des réfugiés n’est pas une affaire de chiffres ni de résultats. Les réfugiés n’ont pas choisi de quitter leur pays, ils ont fui des persécutions. La France a l’obligation de protéger ces personnes, conformément à la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés, qu’elle a signée et ratifiée.
Les réfugiés sont des personnes qui un jour, ont subi violences et/ou harcèlements, parce qu’ils étaient opposants politiques, membres d’une minorité religieuse ou nationale, défenseurs des droits humains, femmes refusant un mariage forcé ou la pratique de mutilations sexuelles. Ils ont dû abandonner leur maison, leur famille, leurs amis, leur situation professionnelle et cherchent asile.
Plus de cinquante villes et relais réfugiés AIF lancent donc des actions, à Paris et en province, pour :
Sensibiliser le public à la cause des réfugiés, leur donner un visage : qui sont les réfugiés, pourquoi partent ils de chez eux, que recherchent-ils ?
Réhabiliter l’image des demandeurs d’asile : ce sont des personnes qui sont menacées et ont besoin de protection.
Montrer les conséquences de la politique migratoire sur la vie de ces personnes, de leur parcours à l’accueil qui leur est fait en arrivant.
Alerter sur le projet de loi relatif à l’immigration qui comporte plusieurs dispositions portant directement atteinte au droit d’asile et dont les députés débuteront l’examen en septembre prochain.
Faire agir le public pour que soient respectés les droits des réfugiés en France.
Le déclenchement de la procédure d’asile est laissée à l’initiative des préfectures qui disposent d’un important pouvoir d’appréciation.
L’accès à la procédure n’étant pas strictement encadré, contrôlé et uniformisé sur l’ensemble du territoire, des pratiques préfectorales de refus d’enregistrement immédiat se développent en marge des normes claires et précises en matière de droit d’asile.
Par ailleurs, en France comme au niveau de l’Union européenne, le discours politique évoque trop souvent une fraude massive qui remet en question le témoignage des demandeurs, élément déterminant dans les dossiers pour obtenir l’asile. Ce discours revient à tous les stades des procédures et légitime de fait des pratiques contestables, voire illégales qui conduisent au rejet des demandes.
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Les réfugiés ont un visage, une histoire. Ils ont aussi des droits.
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Hortefeux condamné pour propos racistes
Communiqué LDH
La Ligue des droits de l’Homme a pris acte de la condamnation de Brice Hortefeux pour « propos outrageants » envers les personnes d’origine arabe par la 17e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris.Ainsi donc, les « Auvergnats » qui posent « des problèmes » parce qu’ils sont trop nombreux en France étaient bien, dans la bouche du ministre
de l’Intérieur, ce que chacun avait compris : des Maghrébins.
A l’évidence, l’exercice des fonctions de ministre de l’Intérieur par un citoyen raciste, le fût-il « en privé », n’est pas compatible avec le respect des devoirs constitutionnels du gouvernement. Nicolas Sarkozy lui-même, venant d’être élu président de la République, n’avait-il pas promis de « faire de la France une République irréprochable et une démocratie exemplaire » ?
« Je ne tolèrerai jamais que des propos racistes ou discriminants soient tenus dans notre pays, d’autant plus par un représentant de l’Etat, quel qu’il soit. Ces comportements sont indignes des valeurs de la République ». Parce que la LDH approuve ce jugement sévère émis par Brice Hortefeux lui-même le 23 août 2009, elle ne doute pas que, si la condamnation du ministre pour injure raciste est confirmée en appel, il aura à cœur de ne pas attendre que les autorités constitutionnelles en tirent les conséquences qui s’imposent. Comme ce serait le cas dans tout autre pays démocratique.
Paris, le 7 juin 2010.
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Indigène un jour, indigène toujours
Il existe des personnes qui veulent reconnaître le côté positif de la colonisation menée par la France dans les siècles passés.
Ce qui est essentiel, c'est de regarder le processus dans sa globalité pour en comprendre le fonctionnement. La colonisation, c'est s'approprier le territoire d'un autre au nom d'un soi-disant développement supérieur.
En partant sur de tels principes, on peut être certain qu'à plus ou moins long terme des conflits surgiront et l'Histoire montre qu'aucun pays colonisateur n'en sort vainqueur.
Comment peut-on administrer un pays avec d'un côté des indigènes privés de droits et de l'autre des citoyens d'un pays dont la devise comporte "égalité"?
50 ans après l'indépendance de ses principales colonies, la France n'en a pas fini avec ses indigènes. Malgré le film du même nom et les promesses du Président de la République, la question de l'égalité des pensions militaires n'est toujours pas réglée.
Interrogé sur ce point, le Conseil Constitutionnel vient de censurer les lois qui instaurent cette discrimination. Mais combien d'anciens combattants seront encore vivants le jour les textes qui mettront à égalité les Indigènes et les Français seront promulgués?
Voici un extrait d'un article du "Monde Diplomatique" qui revient sur le sujet :
Le dossier est sensible sur le plan politique (la justice, la mémoire, le prix du sang) et douloureux sur le plan humain (les bénéficiaires s’éteignent les uns après les autres). Et il n’est pas nouveau : les pensions et indemnités d’invalidité des anciens combattants originaires des colonies (les « indigènes ») avaient été revalorisées une première fois en 1981, au début du premier septennat de François Mitterrand, une deuxième fois sous les gouvernements Jospin et Raffarin, puis officiellement « décristallisées » sous la présidence de jacques Chirac – mais chaque fois en maintenant une inégalité entre ressortissants des ex-colonies et Français .
C’est cette inégalité dans le traitement des pensions de ressortissants étrangers civils ou militaires – inscrite dans les lois de finances d’août 1981, puis de 2002 et 2006 – qui a été déclarée non constitutionnelle par le Conseil. Cinquante ans : c’est le temps qu’il aura fallu pour décider que ces anciens fonctionnaires civils ou militaires ne pourront plus être traités différemment en fonction de leur seule nationalité. D’ici le Ier janvier 2011, le gouvernement devra faire adopter de nouveaux textes et fixer des barèmes égalitaires, en appliquant en principe une rétroactivité sur quatre ans : ce délai avant l’abrogation des lois actuelles lui a été accordé afin d’éviter que la censure des textes en vigueur ne renvoie les pensionnés du Maghreb, d’Afrique noire, du Pacifique à un texte précédent, encore plus inégalitaire…
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Voile intégral: bien poser la question.
Le gouvernement prépare une loi sur l'interdiction du voile intégral.
Cette question est pour le moins complexe, et par ailleurs elle ne concerne qu'une toute petite minorité en France.
Il n'est pas possible de répondre par oui ou par non à la question de l'interdiction du port du voile intégral, comme il est pratiquement certain qu'une loi ne réglera pas le problème
Les autorités veulent faire croire que leur mesure n'est pas anti-musulmane, faut-il rappeler qu'en France l'existence de religieuses voilées et
totalement cloîtées n'a semble-t-il jamais choqué personne : la loi qui se prépare ne souhaite pas se préoccuper des femmes qui subissent une contrainte dans la sphère "privée". Pourtant, quand on s'inquiète des violences physiques faites aux femmes, personne n'aurait l'idée de limiter leur protection à la sphère publique.
Si le port du voile est si intolérable, pourquoi l'autoriser dans la vie privée ?
Nous vous présentons deux positions argumentées : une venant d'Amnesty International, l'autre de la Ligue des Droits de l'Homme.
A vous de vous faire votre propre opinion.
Tribune de Widney Brown, directrice générale chargée des questions relatives au droit international et à la stratégie politique, à Amnesty International.
«A l'heure ou la France s'achemine vers une loi interdisant le port de la burqa ou du niqab dans l'espace public, le gouvernement semble ignorer le droit à la liberté d'expression et de religion. Le corps des femmes ne doit jamais devenir un champ de bataille. Ce sont les femmes, et elles seules, qui doivent décider de ce qu'elles portent.
Les défenseurs du projet de loi maintiennent qu'ils protègent les femmes vivant dans un milieu musulman contre toute contrainte visant à leur faire porter la burqa ou le niqab. Ils se présentent donc comme des défenseurs de l'égalité des droits pour les femmes.
Il est vrai que certaines femmes font l'objet de pressions de la part de membres de leur famille ou de leur entourage. Cela est inacceptable. Aucune femme, aucune jeune fille ne doit vivre dans la peur de subir des violences ou de voir sa réputation salie parce qu'elle refuse de porter le voile.
Aucun gouvernement ne doit tolérer au nom de valeurs religieuses ou culturelles les attaques cruelles infligées à des femmes en Afghanistan, au Pakistan, en Algérie, en Iran et en Irak par des individus dont certains sont à la solde de l'État, d'autres non. L'État a cependant le devoir de réagir à ces menaces et à ces violences en ciblant l'auteur des faits, et non en exerçant sa propre domination sur la victime.
Exclusion de la sphère publique
Dans le cas des femmes qui sont contraintes de porter une burqa ou un niqab, la conséquence d'une interdiction sera de les exposer à une sanction pénale de l'État si elles s'aventurent dans l'espace public; plus vraisemblablement, elles se retrouveront enfermées dans l'espace privé. Un tel résultat irait à l'encontre du but recherché.
Si l'État est prêt à intervenir pour mettre ces femmes à l'abri des traitements coercitifs, brutaux, violents ou discriminatoires infligés par leur entourage, les femmes doivent savoir quelles ressources sont mises à leur disposition. Privées de la possibilité d'évoluer dans l'espace public, elles n'auront guère l'occasion, par exemple, de lire une affiche concernant leur situation apposée dans le métro.
En France, quelques femmes font le choix de porter le voile intégral. En excluant des femmes de la sphère publique, propice à la prise de décisions, on ne protège pas celles qui subissent la contrainte et la violence, pas plus qu'on ne renforce la capacité d'agir de celles qui usent de leur droit de choisir. Cette loi porte atteinte, de manière discriminatoire et injustifiée, à leur droit à la liberté de religion et d'expression.
Une autre justification avancée par les défenseurs du projet de loi repose sur des motifs liés à la sécurité publique. Il est vrai que les pouvoirs publics sont dans l'obligation d'assurer la sécurité mais les représentants des autorités peuvent très bien demander aux femmes concernées de montrer leur visage lorsque cela s'impose. Il est absurde de prétendre que les femmes qui portent un niqab mettent en danger la sécurité publique en France.
Mesures fortes pour promouvoir l'égalité
Si la France veut réellement s'acquitter de l'obligation qui lui incombe de réaliser l'égalité entre femmes et hommes, il existe des mesures
spécifiques que cet État peut prendre. Il peut ainsi évaluer la façon dont sa législation, ses politiques et ses pratiques mettent à mal l'égalité entre les sexes et rejettent les musulmanes et les immigrées. Il peut prendre des mesures fortes pour promouvoir l'égalité et combattre la discrimination. Par exemple, les autorités peuvent veiller à ce que les établissements scolaires développent pour tous les élèves une offre variée en matière d'enseignement, sans orienter systématiquement les fillettes et jeunes filles vers des filières traditionnellement «féminines». Et s'assurer que les femmes reçoivent bien à travail égal, un salaire égal.
Le gouvernement peut faire en sorte que les femmes bénéficient d'un accès au crédit et à d'autres formes de participation à la vie économique. Il peut mettre sur pied des dispositifs destinés à encourager les femmes de toutes origines à participer aux instances politiques. Ce sont les femmes, et elles seules, qui doivent décider du moment et des conditions de leur participation à la vie publique, dans le domaine du travail ou celui de la politique. L'État est dans l'obligation de veiller à ce qu'elles disposent du pouvoir de décision nécessaire pour réaliser leurs aspirations. Il est indéfendable de pratiquer le paternalisme au nom de la fraternité.»
Prise de position du Comité central de la LDH
Depuis l’affaire de Creil en 1989, la LDH a maintenu avec constance sa position, joignant la critique du port du foulard et du voile, au nom de l’émancipation des femmes, au refus de toute loi excluante, stigmatisante et empiétant sur les libertés publiques. Or, il se trouve qu’aujourd’hui cette position est celle de nombreux citoyens et responsables politiques et en particulier celle de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme, alors même que le débat s’est crispé.
Bien plus rédhibitoire que le foulard, on a vu apparaître le port ultra-minoritaire mais spectaculaire du voile intégral ; le gouvernement a lancé un débat sur l’identité nationale, très vite identifié par l’opinion comme un débat sur l’Islam ; le premier ministre nous annonce une loi interdisant le port de la burqa. Disons tout de suite, pour sortir de la confusion, que parler de « burqa » est un abus de langage : le mot désigne le costume généralement bleu, entièrement fermé, avec un grillage devant les yeux, imposé aux femmes par la société afghane. Le voile intégral, noir, d’origine saoudienne, est une négation rédhibitoire de la personne, mais il ne renvoie pas à l’horreur meurtrière des talibans. Dramatiser le débat, s’il en était besoin, n’est pas innocent.
Nous tenons à affirmer un certain nombre d’éléments essentiels.
1- La laïcité n’a rien à voir dans la question du voile intégral
Les législateurs de 1905 s’étaient résolument refusés à réglementer les costumes, jugeant que c’était ridicule et dangereux : ils préféraient voir un chanoine au Parlement en soutane plutôt qu’en martyr. La laïcité qu’ils nous ont léguée et à laquelle nous sommes fortement attachés, c’est la structure du vivre ensemble : au-dessus, la communauté des citoyens égaux, la volonté générale, la démocratie ; en dessous, des communautés partielles, des syndicats, des associations, des Eglises, une socialisation multiple et libre qui peut même se manifester ou manifester dans l’espace public, mais en aucun cas empiéter sur la volonté générale, et enfin la singularité des individus qui choisissent librement et combinent entre elles leurs croyances et leurs appartenances.
En conséquence, le politique n’a ni à se mêler de religion, ni à traiter une religion différemment des autres ; la loi n’a pas à régler les convictions intimes qu’elle suppose chez les individus ; la République n’a pas à dire ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas mais à protéger également tous ceux qui résident sur son territoire, sauf s’ils mettent en cause l’ordre public.
Le pluralisme religieux et culturel est constitutif de l’unité de la France, qui a toujours connu à la marge des dérives fanatiques, intégristes ou sectaires déplorables mais éphémères. Donc laissons la laïcité tranquille.
2- L’égalité hommes-femmes attend une vraie politique
L’argument principal, et tout à fait justifié sur le fond, contre le port du voile, c’est qu’il signale de manière radicale l’infériorisation des femmes. C’est bien le cas si le port du voile est imposé par le mari ou un autre homme de la famille. Dans ce cas, la France dispose des outils législatifs permettant à une femme de déposer une plainte pour contrainte ou séquestration et d’obtenir le divorce aux torts de son mari ; sachant bien sûr combien cette démarche peut être difficile pour elle.
Mais il peut s’agir aussi, comme l’attestent de nombreux témoignages, d’une servitude volontaire. Or la liberté ne s’impose jamais par la force ; elle résulte de l’éducation, des conditions sociales et d’un choix individuel ; on n’émancipe pas les gens malgré eux, on ne peut que leur offrir les conditions de leur émancipation. Pour faire progresser l’égalité et la mixité entre les hommes et les femmes, ce qui est urgent, c’est de promouvoir des politiques dans les domaines éducatifs, salariaux et professionnels, des droits sociaux, un meilleur accès à la santé et à la maîtrise de la procréation. Ces problèmes concernent des millions de femmes dans la France d’aujourd’hui et ne sont en rien traités de façon prioritaire. Un abcès de fixation sur quelques centaines de cas ne fait certainement pas avancer l’égalité, qui appelle au contraire à revenir à la solidarité entre toutes les femmes.
3- Une surenchère de discriminations n’est pas la solution
La question du voile intégral renvoie en réalité à un profond malaise des populations concernées, auxquelles la République n’a pas pu ou pas été capable de faire une place. D’où l’apparition de vêtements et de coutumes dont la signification est très complexe, depuis le port du foulard par des adolescentes des banlieues comme signe identitaire jusqu’à ce voile intégral qui est un paradoxe : à la fois dissimulateur de la personne et signe ultra-visible, provocateur, d’un refus de la norme sociale, sous prétexte tantôt de religion, tantôt de pudeur. Même si nous réprouvons ce choix, ce n’est pas une raison pour essentialiser et déshumaniser des femmes qu’on réduit à un signe abstrait et que l’on exclut de toute vie publique.
Interdire le voile, c’est conforter la posture de ces femmes, c’est en faire doublement des victimes : résultat absurde d’une volonté soit-disant émancipatrice. Elles porteraient seules le poids d’une interdiction imposée en grande partie par la domination masculine, et cette interdiction les exclurait à coup sûr de la cité. En revanche tous les musulmans, hommes compris, se sentiraient blessés par une loi qui ne toucherait que l’islam.
4- Droits et libertés
Ce serait en plus ouvrir une voie extrêmement dangereuse en termes de libertés publiques. Réglementer les costumes et les coutumes est une pratique dictatoriale ; que ce soit de façon discriminatoire, pour signaler une population donnée, ou au contraire par l’imposition d’une règle universelle. Obliger les femmes à porter le voile comme leur interdire de cacher leur visage (sauf dans les cas prévus où l’identité doit être prouvée) est également liberticide.
Si une telle hypothèse est présente, c’est que la société française a été profondément intoxiquée par des idées venues de l’extrême-droite et qui se sont infiltrées jusque dans la gauche : la peur de l’immigré, de l’étranger, les relents de notre histoire coloniale, la tentation de l’autoritarisme.
La LDH a une tout autre conception de la démocratie, des droits, de l’égalité et des libertés.
4- Vivre ensemble
La LDH refuse les termes d’un débat instrumentalisé, qui risque de déboucher sur une loi perverse et dangereuse.
Des millions de musulmans vivent en France, et pour beaucoup vivent mal. Ce n’est pas un ministère de l’Identité nationale qui résoudra leurs problèmes et qui leur offrira un avenir, mais des politiques sociales et anti-discriminatoires ; c’est un travail politique, citoyen, de réflexion sur les conditions du “vivre ensemble“.
C’est aussi leur responsabilité individuelle et collective, qui attend par exemple, pour ceux qui sans en avoir la nationalité résident en France, le droit de vote pour pouvoir s’exercer.
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Base élèves : levée des sanctions, sécurisation des données personnelles
Communiqué commun FCPE , LDH et Snuipp-FSU
La FCPE, le Snuipp-FSU et la LDH rappelant leurs interrogations et leurs exigences formulées à propos de l’application de « Base élèves » dans une lettre commune adressée au ministre de l’Education nationale en mars 2009, réaffirment que les risques de diffusion de données personnelles concernant les enfants et leurs familles hors de la communauté éducative et la durée excessive de conservation de ces données mettent en danger le droit au respect de la vie privée et entrent en contradiction avec les stipulations de la Convention internationale des droits de l’enfant.
Nous rappelons que le Comité des droits de l’enfant de l’Onu a fermement questionné, en juin 2009, le gouvernement français sur l’utilisation de fichiers de personnes dans les écoles et a recommandé à la République française « de ne saisir dans les bases de données que des renseignements personnels anonymes et de légiférer sur l’utilisation des données collectives en vue de prévenir une utilisation abusive des informations ».
Alors que le ministre avait promis d’apporter toutes les garanties demandées, nous constatons l’absence d’explication sur la nécessité de faire
circuler ces données hors des établissements scolaires et de garanties quant à leur sécurisation ; l’absence d’application des garanties de suppression des données désormais non exigibles mais collectées durant la phase d’expérimentation du fichier ; l’absence d’informations sur les interconnexions que rendra possible cette base nationale et de garanties quant au contenu des données, à leur anonymisation et aux conditions d’accès à cet outil. Nous continuons également à demander dans quelles conditions ont été et seront informés les parents d’élèves du traitement informatisé des informations qu’ils donnaient à l’école, conformément aux dispositions de la loi de 1978 modifiée relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. Enfin, nous demandons que dans le cadre de cette remise en cause de cette application un bilan de « Base élèves » soit effectué en termes de fonctionnalité de l’outil et de protection des libertés publiques.
Enfin, deux directeurs d’écoles de l’Isère se sont vu retirer leur fonction le 30 mars 2010 par l’inspectrice d’Académie au seul motif qu’ils refusaient de renseigner la base de données « Base élèves » premier degré. Une douzaine de leurs collègues sont déjà dans ce cas à l’échelle nationale. Pour un autre, directeur d’école dans le Vaucluse, le blâme reçu de sa hiérarchie est officiellement motivé, non seulement par ce refus, mais aussi par l’envoi à un collègue de dessins humoristiques illustrant la campagne sur les dangers du fichage ; ce qui est une atteinte manifeste à la liberté d’expression.
Nous ne pouvons accepter que des enseignants soient menacés ou sanctionnés alors qu’ils veulent que l’exercice de leurs fonctions ne porte pas atteinte aux droits des enfants et de leurs familles.
Nous demandons instamment au ministre de l’Education nationale de lever toutes les sanctions prises contre les directeurs d’école qui refusent d’alimenter le fichier « Base élèves premier degré, et de mettre sans délai les conditions d’information, de diffusion et de conservation des données collectées en conformité avec les obligations constitutionnelles et internationales de la France en matière de protection des droits de l’enfant et de libertés fondamentales conformément aux engagements pris en 2009.
Paris, le 19 mai 2010
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Communiqué de l’Observatoire de la liberté de création
Le film Hors-la-loi de Rachid Bouchareb, qui va être présenté au Festival de Cannes a fait l’objet de pressions politiques de la part de plusieurs élus de la majorité, relayées par un secrétaire d’État, pour que ce film soit censuré ou privé de ses subsides.
Sur la seule lecture du scénario d’Olivier Lorelle, des pressions ont été exercées sur les chaînes de France Télévisions qui le coproduisent et sur
les responsables du Festival qui l’ont sélectionné.
La projection de ce film en sélection officielle au Festival de Cannes s’annonce sous des auspices inquiétants : des manifestations hostiles sont prévues, et une cérémonie en mémoire de « toutes les victimes de la guerre d’Algérie » doit être organisée à Cannes le 21 mai, jour de la projection du film. Le sous-préfet Claude Serra déclare qu’il sera présent pour cette cérémonie, devant le monument aux morts. Par ailleurs, un collectif proche de l’extrême droite appelle sur un site Internet à manifester à Cannes pour « pourrir » le Festival, en protestation contre la sélection de ce film.
L’Observatoire de la liberté de création s’étonne de ces déclarations émanant de personnes qui n’ont pas vu le film, et proteste contre ces pressions de responsables politiques qui cherchent à faire obstacle à la liberté du réalisateur de donner sa version de la guerre d’Algérie, et veulent empêcher le public d’avoir accès à ce film de fiction. Il n’appartient pas à l’Etat et à ses services de décréter ce que serait une « véritable » histoire. Lorsque le film sera diffusé, le débat critique pourra alors avoir lieu sereinement.
Paris, le 10 mai 2010.
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Parthenay : le maire censure l’histoire
Communiqué LDH
Le maire de Parthenay (Deux-Sèvres) a décidé de refuser la lecture publique par des élèves d’une lettre écrite par Ida Grinspan, ancienne déportée, dans le cadre de la Journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation.Rescapée des camps d’extermination, elle évoque son arrestation par « trois gendarmes ». Mais cette stricte vérité historique, factuelle, a pourtant amené le maire de la commune à cette décision au motif qu’il convient de refuser de « stigmatiser » une catégorie professionnelle en particulier.
Refuser de faire entendre un témoignage évoquant, dans une cérémonie sur la déportation, le rôle de la gendarmerie française, revient
malheureusement à refuser de regarder en face les réalités de l’histoire, à un moment où des falsifications manifestes continuent à être énoncées. C’est un appui apporté à l’extrême droite revancharde, xénophobe, pétainiste, dont on a bien vu dans les dernières élections qu’elle n’est pas morte.
(Photo extraite du film "la rafle")
Aucune raison ne peut justifier le refus de faire entendre le témoignage évoquant, dans une cérémonie sur la déportation, le rôle de la gendarmerie française, sauf à s’inscrire dans un négationnisme intolérable. Le maire de Parthenay a commis une faute morale et politique qu’il lui appartient de réparer, en faisant procéder à une lecture publique du texte censuré, et en s’excusant publiquement auprès de Ida Grinspan.