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Mégabassines sur la Sèvre niortaise : où en est-on ?

Publié le 28 novembre 2025 par Nature Environnement 17

 

L’actualité récente a mis en lumière les évènements passés à Sainte-Soline et a relancé le débat sur la criminalisation des militants écologistes. Alors que 4 militants seront jugés en appel la semaine prochaine, un point essentiel reste peu abordé : l’illégalité de la bassine de Sainte-Soline.

Un projet pensé pour satisfaire des intérêts économiques privés

Le projet de construction de 16 mégabassines sur la Sèvre niortaise a débuté en 2017. Depuis cette date, les associations environnementales n’ont cessé d’alerter sur le manque de collégialité dans la prise de décision alors que la protection de la ressource en eau est d’intérêt général et qu’elles y sont impliquées depuis des décennies.

Les associations dénoncent aussi l’ancienneté des données utilisées dans l’étude d’impact (2001-2011) en contradiction avec la quantité d’eau disponible à ce jour, l’absence de prise en compte du changement climatique, notamment la diminution de la quantité d’eau disponible à l’avenir et le non-respect de la réglementation liée aux espèces protégées.

Les associations critiquent en outre la faiblesse des engagements agroécologiques pris par les irrigants, vitrine du projet justifiant d’importants financements publics.

Un collectif de 10 associations (Nature Environnement 17, le Groupe Ornithologique des Deux-Sèvres, la Ligue pour la Protection des Oiseaux, les Fédérations de pêche 17, 79 et de Saint-Maixent, Poitou-Charentes Nature, Vienne Nature, SOS Rivières et Environnement et l’Association de Protection, d’Information et d’Etudes de l’Eau et de son Environnement) a ainsi porté le dossier devant la justice.

Première instance : la taille des bassines revue à la baisse  

Le 27 mai 2021, le Tribunal administratif de Poitiers a demandé au porteur de projet, la Coop de l’eau 79, de diminuer la taille de 9 réserves sur les 16 envisagées.

Toutefois, les données utilisées par le juge pour redimensionner les réserves étaient, de l’avis des associations, déjà obsolètes. Les impacts sur les espèces protégées avaient en outre été écartés. Les associations ont donc fait appel.

Instance d’appel : la prise en compte des espèces protégées

Le 18 décembre 2024, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a annulé les autorisations environnementales de 4 réserves car elles ne comportaient pas de dérogation à l’interdiction de détruire des espèces protégées malgré les impacts importants sur l’avifaune de plaine dont l’Outarde canepetière.

L’exigence de dérogation concerne les réserves projetées dans des zones particulièrement sensibles en termes de biodiversité, à savoir les réserves de Saint-Sauvant (86), Messé (79), Mougon (79) et Sainte-Soline (79).

Or, illustration de la politique du passage en force, la bassine de Sainte-Soline avait été construite alors que les recours n’étaient pas purgés.

C’est la raison pour laquelle le collectif d’associations avait déposé plainte début 2024 pour destruction d’habitat d’une espèce protégée.

A ce jour, la bassine de Sainte-Soline est donc illégale et ne peut pas être utilisée en raison de ses impacts sur les espèces protégées.

L’annulation de l’autorisation d’irrigation

Le collectif d’associations avait déposé un pourvoi devant le Conseil d’Etat concernant les arguments liés à la gestion de l’eau non retenus en appel. Toutefois, le pourvoi n’ayant pas passé le filtre de l’admission, la juridiction ne s’est pas prononcée sur ces arguments.

Ces derniers ont néanmoins été entendus par le biais d’un autre contentieux : le recours de Nature Environnement 17 contre l’Autorisation Unique de Prélèvement (AUP) pour l’irrigation agricole sur le territoire du Marais poitevin.

L’AUP concerne l’ensemble des prélèvements sur le territoire dont les 16 réserves prévues sur la Sèvre niortaise. Par jugement du 9 juillet 2024, confirmé en appel le 26 septembre 2025, les juges administratifs ont annulé l’AUP en raison de l’excessivité des volumes autorisés pour l’irrigation et les ont diminués.

Or, les nouveaux volumes ne permettraient de remplir que ces 16 réserves et laisseraient les autres irrigants du périmètre sans eau, élément que dénonçaient les associations depuis des années. La volonté d’accaparement de l’eau par une minorité d’irrigants ne peut plus être niée.

Les suites ?

A l’heure actuelle, la situation des réserves est plus qu’incertaine. 4 bassines, dont une illégale (Sainte-Soline) sont construites. A Mauzé, les premiers remplissages ont déjà été préjudiciables à l’environnement en asséchant les cours d’eau.

Si des engagements agroécologiques avaient été pris en échange de financements publics, la tentative de greenwashing n’a pas fonctionné puisqu’en novembre 2023 un rapport indépendant a relevé que les engagements n’étaient pas respectés. Par exemple, alors que les irrigants raccordés devaient réduire leur utilisation de pesticides, ils l’ont en réalité augmentée.

En outre, et malgré la loi Duplomb qui tente d’écraser la réglementation espèce protégée, les conditions de délivrance d’une dérogation à l’interdiction de détruire une espèce protégée sont très incertaines. Les 4 réserves concernées impactent en effet plus de 30 hectares d’un habitat rare.

Les financements publics semblent aussi bloqués et la Coop de l’eau 79 fait face à des difficultés économiques (Reportage Reporterre – Reportage Médiapart). L’eau promise n’existant pas, il est fort à parier que les irrigants du périmètre non reliés aux réserves et devant pourtant participer financièrement au projet refuseront, à raison, de payer.

Aussi, le journal Médiapart a révélé que les chantiers de deux bassines (Mauzé (79) et Aiffres (79)) étaient pour l’instant bloqués en raison de fouilles archéologiques. La Coop de l’eau 79, informée depuis 2021, n’avait pas diffusé l’information.

Enfin, la ressource en eau diminuant du fait du changement climatique, la quantité d’eau à prélever pour remplir ces bassines va encore se réduire et potentiellement entrer en confrontation avec l’alimentation en eau potable.

Il semble temps de mettre en place une véritable gestion collective de l’eau visant l’intérêt général et la protection des milieux naturels. Le changement climatique l’impose.

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