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Nous, scientifiques, appelons à la mobilisation contre l’extrême droite

Tribune publiée dans le Nouvel Observateur le 25.06.2024

Nous sommes des chercheur·es, enseignant·es-chercheur·es de toute la France et de toutes disciplines scientifiques. Un aspect de notre mission est de porter dans l’espace public les consensus scientifiques : l’origine humaine du réchauffement du climat, les causes de l’effondrement de la biodiversité, la gravité des pollutions de l’eau, du sol et de l’air et leur impact sur le vivant et nos sociétés humaines, l’effet des politiques publiques sur la hausse des inégalités et de la précarité en sont des exemples.

Nous ne pouvons concevoir notre mission indépendamment du respect de certaines valeurs au nom desquelles nous nous exprimons aujourd’hui : nous sommes profondément attaché·es à l’humanisme, à l’équité, à la solidarité entre personnes au sein des générations actuelles et avec les générations futures ; nous rejetons toutes les oppressions, notamment celles à caractère racial ou genré, et défendons une recherche au service de l’intérêt général.

Nous l’affirmons clairement : l’accès au pouvoir de l’extrême droite fait non seulement peser des risques graves sur la recherche et l’enseignement, sur la place accordée aux faits scientifiques dans le débat public, mais elle menace surtout le modèle même de société auquel nous aspirons : une société démocratique où les décisions émergent de débats collectifs, ouverts, libres, respectueux et bien sûr informés.

Le RN nous promet un monde en surchauffe

L’expérience récente de son arrivée au pouvoir dans d’autres pays, y compris voisins, montre que l’extrême droite mine l’Etat de droit et les contre-pouvoirs en s’attaquant au pluralisme de l’information, en contestant le fonctionnement de la justice ou ses décisions. Une autre des constantes de ces gouvernements est l’oppression des femmes, des personnes racisées, des LGBTQIA +et des plus pauvres.

D’autres mesures, ou parfois de simples mais répétés discours discriminants, véhiculent une violence qui permet d’instaurer une société oppressive et discriminante, fidèle aux principes mêmes de ce mouvement qui a toujours voulu opérer un tri entre les individus. Les votes de député·es du RN laissent présager qu’il ne ferait pas exception en cas d’accès au pouvoir en France.

Une autre constante des extrêmes droites est leur déni des alertes scientifiques concernant l’urgence climatique et écologique. Le RN se défend de tout climato-scepticisme, mais relativise les rapports du Giec. Il s’oppose au déploiement des énergies renouvelables, alors que tout miser sur le nucléaire ne permettrait pas de respecter l’accord de Paris à l’échelle française. 

En s’opposant à l’électrification des transports, en voulant baisser les taxes sur les énergies fossiles, en s’opposant à toutes les mesures de décarbonation, aux mesures de sauvegarde de la biodiversité, à la diminution des pesticides et au zéro artificialisation nette (ZAN), mais en étant favorable au développement routier, c’est un monde bétonné, goudronné, pollué, en surchauffe et sans vie que nous promet le RN. Pourtant, selon ce parti, toute mesure écologique est « punitive ». De quel côté sera la punition dans un monde à +3 ou +4 °C ?

Lutter contre l’obscurantisme et la démagogie

Enfin, l’attachement des scientifiques aux faits est toujours gênant pour les extrêmes droites, qui ont un rapport très distancié avec la vérité. Au Brésil et aux Etats-Unis, on a assisté à des baisses drastiques de budgets dans l’éducation et la recherche qui ont fait peser de graves menaces sur l’indépendance scientifique. En Hongrie, le gouvernement de Viktor Orbán a remis en question l’indépendance d’institutions académiques pour s’assurer qu’elles ne remettent pas en cause son idéologie.

Les extrêmes droites développent la défiance envers les résultats de la recherche scientifique et adoptent une posture de post-vérité, où les dirigeants délivrent leurs propres « faits alternatifs », sous couvert de liberté d’opinion. La vérité n’est pas une opinion ou une position exprimée par une autorité.

Etre scientifique, c’est avant tout se plier à l’exercice du débat critique duquel ressort un consensus. C’est aussi lutter contre l’obscurantisme et la démagogie et pour la diffusion des connaissances et le développement de l’esprit critique qui sont nécessaires à la démocratie. La société et les valeurs dans lesquelles nous nous inscrivons seraient gravement compromises dans un pays aux mains du Rassemblement national. 

A l’instar de nombreuses personnes, de collectifs et d’associations citoyennes, nous pensons que le moment est grave et nous invitons à une large mobilisation face à cette menace dans les urnes les 30 juin et 7 juillet prochains.

Le NFP n’est pas une menace pour la République

Nous dénonçons le discours dominant qui présente contre toute évidence le Nouveau Front Populaire (NFP) comme une menace pour la République, étouffant ainsi toute possibilité de débat démocratique et d’alternance, et favorisant de manière irresponsable l’accession au pouvoir de l’extrême droite.

Au-delà du vote, nous appelons à lutter activement sur le long terme contre tout ce qui constitue le terreau de l’extrême droite : l’augmentation des inégalités, le sentiment de déclassement et de déconnexion entre les politiques et les citoyen·nes, la fracture dans l’accès aux services publics, la main-mise des intérêts privés sur les médias et réseaux sociaux, et la récupération électoraliste des obsessions de l’extrême droite par d’autres partis politiques.

Cette mobilisation s’enracine dans les valeurs qui nous sont chères et que nous appelons à défendre : humanisme, équité, solidarité, respect du vivant, émancipation et confiance dans les citoyen·nes pour élaborer des solutions basées sur des débats approfondis.

Pour notre part, en tant que scientifiques et citoyen·nes, nous aspirons à contribuer pleinement à cette lutte et au débat démocratique à la hauteur des enjeux.

Cette tribune a été rédigée par le collectif Scientifiques en Rébellion, et cosignée par plus de 2 500 scientifiques de toutes disciplines. La liste complète des signataires est à retrouver ici, tout comme la version longue de ce texte.

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