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  • les risques d’une dématérialisation à marche forcée

    Alors que près d’un tiers des Français éprouvent aujourd’hui des difficultés avec les outils numériques, l’accélération de la dématérialisation des démarches d’accès aux droits porte atteinte au principe d’égal accès au service public.

    « Aujourd’hui, le numérique est devenu le premier canal d’accès aux services publics » et plus de 250 démarches administratives peuvent désormais être effectuées en ligne, affirme, avec fierté, le gouvernement. Pourtant, 16 millions de personnes, soit près d’un Français majeur vivant en métropole sur trois, est « éloigné du numérique », selon un rapport de l’Agence nationale de la cohésion des territoires publié en avril 2023. Le département Numérique d’ATD Quart Monde, ainsi que le réseau Wresinski Numérique et grande pauvreté, réfléchissent aux actions à mener pour « faire en sorte que la numérisation de la société soit une promesse d’amélioration de la vie de toutes et tous, et non une énième source d’exclusion pour les plus pauvres », explique Lionel Perret, allié du Mouvement et membre de ce département. « Au même titre que l’eau et l’électricité, l’accès à Internet est devenu un droit fondamental. L’inclusion numérique est essentielle, mais cela n’avance pas très vite », poursuit-il.

    « J’ai peur qu’il n’y ait bientôt plus que des échanges numériques »

    Mais sans accompagnement, la dématérialisation des démarches d’accès aux droits peut être vécue comme une épreuve et constituer un frein important pour les personnes en situation de pauvreté. Ainsi, pour Audrey* « le numérique, c’est un combat ». Militante Quart Monde à Toulouse, elle affirme qu’elle « vit dans la peur de mal remplir les dossiers administratifs sur internet ». « Dès que nous faisons une erreur ou que le service fait une erreur, cela prend des mois pour retrouver nos droits. Nous, on est toujours coupables, mais le service ne l’est jamais », constate-t-elle. Alors, elle passe beaucoup de temps au téléphone, pour tenter de « parler à une vraie personne ». « Par téléphone, c’est un casse-tête. Il faut presque mentir aux questions posées par le robot pour réussir à avoir un interlocuteur. Puis, ils nous disent toujours : ‘ne vous inquiétez pas’, mais moi je veux une trace écrite », explique Audrey.

    Cette peur est partagée par Maria Théron, militante Quart Monde en Champagne-Ardenne. « Quand j’envoie un mail, j’ai toujours cette crainte que le mail n’arrive pas et qu’il y ait des conséquences derrière », souligne-t-elle. « Le contact humain est important, on peut mieux s’exprimer quand il y a un désaccord par exemple. J’ai vraiment peur qu’il n’y ait bientôt plus que des échanges numériques », souligne-t-elle.

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  • Halte aux semeurs de haine et de violence.

    Tribune de Patrick Baudouin, président de la LDH, publiée dans Médiapart le 27.03.2024

     

    Selon un rapport du service statistique du ministère de l’Intérieur publié le 20 mars 2024, les crimes ou délits commis en raison de l’ethnie, de la nation, d’une prétendue race ou de la religion ont augmenté en France de 32% en 2023 par rapport à 2022. Ce sont 15.000 infractions à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux qui ont été répertoriées sur l’ensemble du territoire français, soit 8.600 crimes ou délits, ainsi que 6.400 contraventions – dont la hausse, de 4%, est plus faible. Le nombre de crimes et délits enregistrés au dernier trimestre 2023 a doublé par rapport à la même période de 2022, cette nette accélération étant due principalement au nombre d’actes antisémites enregistrés depuis les attaques du Hamas du 7 octobre 2023 et la riposte consécutive israélienne. Mais il en va de même d’un accroissement des actes anti-Arabes et antimusulmans. Quant aux étrangers originaires d’un pays africain, ils sont particulièrement touchés, représentant à eux seuls 11% des victimes de délits ou crimes à caractère raciste, alors qu’ils ne constituent que 4% de la population totale.

    Ce bilan résumé est d’autant plus alarmant qu’il ne traduit sans doute pas toute la réalité des infractions commises et de leur augmentation, alors même qu’il est noté que seules 4% des victimes portent plainte. La dégradation est manifeste depuis la montée en puissance des idées de l’extrême droite qui se traduit notamment par la libération d’une parole décomplexée, y compris de la part de responsables politiques. On se rappellera les propos tenus à l’Assemblée nationale nouvellement composée par un député Rassemblement national (RN), Grégoire de Fournas, interrompant un collègue noir, Carlos Martens Bilongo, d’une tonitruante injonction « qu’il retourne en Afrique ». C’est un autre parlementaire, Meyer Habib, député des Français établis hors de France, qui interviewé sur une radio qualifie de « cancer » la population palestinienne. C’est Salime Mdéré, vice-président du Conseil départemental de Mayotte, qui s’exprimant à la télévision sur les jeunes « gamins » immigrés n’hésite pas à dire qu’« il faut peut-être en tuer ». C’est Jocelyn Dessigny, député RN de l’Aisne, qui lors d’une cérémonie des vœux fait le lien entre les crimes commis « et l’augmentation de la population subsaharienne qui nous vient d’Île-de-France ». A l’encontre de ces trois derniers élus, la LDH a saisi la justice. Confrontée à une multiplication des propos et des actes à caractère discriminatoire, notre association est impliquée dans de nombreuses autres actions judiciaires, par exemple pour la distribution de tracts, tags, libelles incitant à la haine contre des centres d’accueil des étrangers ou contre des gens du voyage, contenant des propos néonazis, ou invitant, comme c’est le cas à Calvi, à mettre « les juifs dehors »

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