Après les catastrophes nucléaires majeures qui se sont produites (notamment à Tchernobyl et à Fukushima), on était en droit d'attendre que des leçons soient tirées afin de mieux protéger les populations environnantes.
Cela a été en partie le cas, avec en particulier des préconisations nouvelles pour les centrales en exploitation (postes de commande et installations de secours devant résister à un accident). Ces mesures ont entrainé un surcoût très important pour EDF, avec un sérieux recul du mythe de l'électricité d'origine nucléaire bon marché.
Du côté de la protection médicale des populations, il n'y a pas de changement majeur. La distribution de comprimés d'iode reste de mise, ceux-ci protégeant d'un cancer de la thyroïde, quand ils sont pris avant une contamination. Et c'est là que le bât blesse, car cette distribution se limite à un rayon de 10 Km autour des centrales.
Une nouvelle campagne est en cours, car l'iode se périme au bout de 7 ans, et la dernière distribution remonte à 2009. Toutes les personnes habitant dans un rayon de 10 Km de la centrale de Chooz sont donc invitées à retirer leurs comprimés d'iode en pharmacie.
Mais au-delà de 10 Km, que se passe-t-il ? Le Figaro nous informe "Au-delà de ce rayon, il existe des stocks départementaux de pastilles d'iode qui pourraient être acheminés aux populations en cas de besoin, rappelle M. Delmestre, chargé du comité de pilotage de la campagne."
Peut-on croire qu'en cas d'accident, les services préfectoraux pourraient distribuer des comprimés en expliquant le mode d'emploi à toute une population non prévenue et dispersée entre ses lieux de travail, d'étude et de loisir. Rappelons que la prise d'iode doit impérativement se pratiquer avant toute contamination.
Nos voisins belges préconisent un rayon de 20 Km autour des centrales, ce qui parait déjà un peu plus réaliste.
Le spécialiste de physique nucléaire précise dans cet article :"Ce ne peut fonctionner que si les gens ne prennent le cachet de façon préventive, quasiment dès l'information qu'il y a un incident majeur", a indiqué Thierry Bastin, professeur de physique atomique à l'ULg. Idéalement, il faut compter 6 heures avant l'exposition à un nuage radioactif pour prendre le cachet."
On sait que la contamination de Fukushima a atteint 50 Km, et les vents étaient heureusement favorables, entrainant le nuage vers l'océan. A Tchernobyl, le nuage radioactif a connu un déplacement considérable, des pays scandinaves jusqu'à la Corse.
C'est pourquoi des voix s'élèvent pour réclamer une augmentation importante du périmètre de distribution d'iode.
En Belgique, 4 ans après cette tragédie de Fukushima, le Conseil supérieur de la santé s'est penché sur la sécurité, en cas d'accident nucléaire dans son pays. Sa recommandation est claire : toute personne vivant dans un rayon de 100 km autour d'une centrale doit disposer de pastilles d'iode pour se protéger. Cela concerne donc l'ensemble de la population belge. (voir l'avis du Conseil Supérieur de la Santé belge)
En France aussi des avis similaires sont donnés. Voici un extrait d'un vœu voté par le Conseil Municipal de Bordeaux en novembre 2014, s'appuyant sur des avis officiels :
A la lumière de la catastrophe de Fukushima qui a révélé des traces de contamination dans un rayon de 50km autour de la centrale, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et l’Association nationale des comités et commissions locales d’information (ANCCLI) s’accordent à penser qu’il faudrait, en France, relever le périmètre des PPI à 80km.
C’est la raison pour laquelle le 7 novembre dernier, l’ANCCLI a demandé officiellement une extension des zones concernées par les plans de secours à un périmètre d’un rayon de 80 kilomètres autour de chaque centrale nucléaire.
10, 20, 80 ou 100 Km, il est certain qu'il y a urgence à se pencher sur cette question, et ne pas attendre une catastrophe en France avant de prendre une décision peu coûteuse et dont on connaît l'efficacité préventive.
Zones de 30 et 100 Km autour des centrales existantes.