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Loi d’orientation agricole : l’agrobusiness en a rêvé, la FNSEA l’a demandé, le gouvernement l’a fait

Communiqué de Greenpeace du 03.04.2024.

Après des mois de concertations illusoires entre la société civile et le ministère de l’Agriculture, suivis de la publication d’un pacte d’orientation agricole en décembre dernier, la très attendue loi d’orientation agricole a enfin été soumise au Conseil des ministres aujourd’hui [1]. Greenpeace est consternée face à l’acharnement du ministère de l’Agriculture à favoriser l’industrialisation du secteur et dénonce les agissements du gouvernement et de l’agro-industrie qui profitent de la crise agricole pour sacrifier l’environnement.

« Sans surprise, ce projet de loi n’est pas à la hauteur des enjeux du renouvellement des générations ni de la transition agroécologique, déclare Sandy Olivar Calvo, chargée de campagne Agriculture à Greenpeace. Pire encore, sous prétexte de “simplification” pour répondre aux demandes du syndicat majoritaire, le gouvernement persiste dans sa volonté d’industrialiser l’agriculture à outrance. Ces mesures sacrifient l’environnement et aggraveront les problèmes rencontrés par les agriculteurs et agricultrices. »

À l’approche des débats qui débuteront mi-mai à l’Assemblée nationale, Greenpeace appelle les parlementaires à s’opposer à cette version du projet de loi afin de la modifier radicalement pour relever le défi du renouvellement des générations et de la transition agroécologique.

La souveraineté alimentaire : un concept détourné par le gouvernement pour justifier et favoriser l’industrialisation de l’agriculture
L’article 1 du projet de loi propose d’inscrire la nécessité de protéger et d’assurer la souveraineté alimentaire. Pour Greenpeace, la notion actuellement proposée ne correspond pas à celle des Nations unies et, derrière cette bonne volonté de façade, le gouvernement dénature et manipule la notion de souveraineté alimentaire pour servir les intérêts de l’agroindustrie. [2].

« Dans sa définition de la souveraineté alimentaire, le gouvernement affirme notamment vouloir “maîtriser les dépendances nécessaires ou stratégiques en matière d’importations et d’exportations” mais cet objectif n’a aucun sens tant que le gouvernement n’assume pas l’urgence de sortir de l’élevage industriel pour réduire notre dépendance aux importations de soja pour l’alimentation animale. Il manque une réelle notion de durabilité à cette notion de souveraineté alimentaire portée par le gouvernement »[3], souligne Sandy Olivar Calvo.

Par ailleurs, Greenpeace s’inquiète particulièrement de la notion de « caractère d’intérêt général majeur » proposée dans cet article : « Au-delà de son aspect symbolique, cette notion pourrait servir de base pour déroger à la législation environnementale, explique Sandy Olivar Calvo. Elle permettrait par exemple de contourner l’obligation de protection des espèces et favoriserait la mise en place de projets à l’impact environnemental majeur, tels que les mégabassines ou les fermes-usines. »

Un article pour accélérer la construction des fermes-usines et des mégabassines
L’article 15 du projet de loi vise à accélérer la prise de décision des juridictions en cas de contentieux contre des projets d’ouvrage hydraulique agricole et d’installations d’élevage. En conséquence, par le biais d’un caractère d’urgence, cet article permettrait de raccourcir les délais des procédures administratives pour ce type de projets, au détriment des associations et des riverains qui auraient moins de temps pour rassembler, mettre en forme et présenter des arguments concernant les risques environnementaux et sanitaires de certains projets agricoles. Le juge aurait aussi, de fait, moins de temps pour se faire une idée claire sur la situation.

« Nous appelons les parlementaires à exiger la suppression pure et simple de cet article afin de s’opposer à la criminalisation des associations et des riverains qui s’opposent à certains projets d’agriculture industrielle, déclare Sandy Olivar Calvo. Les projets qui sont le plus contestés devant les tribunaux sont les projets d’agriculture industrielle ayant des conséquences dramatiques sur les territoires. Accélérer les contentieux juridiques est une méthode dysfonctionnelle : plutôt que d’alléger les tribunaux et d’apaiser les débats, cela risque au contraire d’engendrer encore plus de dépôts de recours juridiques et de profonds clivages. »

Greenpeace appelle également les parlementaires à la plus grande vigilance dans le cadre de cette partie sur la simplification et concernant les amendements qui pourraient s’y ajouter.

Plutôt que d’accélérer les procédures face à des projets largement contestés, Greenpeace appelle à se saisir de cette loi pour transformer notre agriculture et l’orienter vers des modèles durables, notamment en installant des élevages paysans et écologiques plutôt que des projets d’agriculture industrielle. Il est crucial de redonner une réelle ambition à ce texte de loi afin de fixer un cap clair pour l’installation, la transmission et la transition agroécologique.

 

Notes aux rédactions :

[1] Voir « Pacte d’orientation agricole : un échec politique pour l’avenir de notre agriculture« , communiqué de presse Greenpeace France, 15 décembre 2023

[2] Voir la définition de la Via Campesina.

[3] Voir « Mordue de viande, l’Europe alimente la crise climatique par son addiction au soja« , rapport de Greenpeace, juin 2019

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