Dans un rapport dévoilé aujourd’hui, Greenpeace calcule que le simple fait d’arrêter l’avion pour les vols les plus fréquentés dans l’Union européenne, dès lors qu’une liaison ferroviaire de moins de six heures existe, permettrait d’économiser 3,5 millions de tonnes d’équivalent CO2 par an. Un tiers des 150 vols court-courriers les plus fréquentés dans l’Union européenne dispose déjà de cette alternative, et le réseau ferroviaire européen est encore nettement améliorable. C’est désormais aux dirigeants européens, français compris, de se saisir du sujet.
Des pistes pour limiter les émissions de gaz à effet de serre des transports en Europe
Cette étude d’OBC Transeuropa (OBCT), commandée par l’unité européenne de Greenpeace, analyse les 150 vols court-courriers les plus fréquentés au sein de l’Union européenne et les 250 vols court-courriers les plus fréquentés en Europe (UE, Norvège, Royaume-Uni et Suisse). Une attention particulière a été portée aux liaisons impliquant la France, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, la Belgique, les Pays-Bas et l’Autriche (les liaisons avec les îles n’ont pas été analysées, sauf lorsqu’il existe une liaison ferroviaire, comme pour la Sicile).
Parmi les enseignements :
- 34 % (51) des 150 vols court-courriers les plus fréquentés dans l’Union européenne disposent d’une alternative ferroviaire de moins de six heures.
- Seuls 27 % (41) des 150 vols les plus fréquentés dans l’Union européenne disposent d’alternatives directes en train de nuit en 2021.
- 30 des 150 vols les plus fréquentés dans l’Union européenne ont pour destination et/ou pour origine la France.
- Il existe une alternative ferroviaire de moins de six heures pour près de la moitié (47,5 %) des 40 vols les plus fréquentés qui ont pour destination et/ou pour origine la France.
“On émet 10 fois plus d’équivalent CO2 quand on fait Paris-Amsterdam en avion plutôt qu’en train, alors que ce trajet peut se faire en moins de 3h30 en train ! La réduction du trafic aérien est incontournable pour tenir les objectifs climat de l’Accord de Paris, et la suppression des vols courts constitue un premier pas à cet égard. Des alternatives existent déjà pour de nombreux vols, et le développement d’un véritable réseau ferroviaire européen, incluant le train de nuit, doit constituer une priorité pour les responsables politiques : il reste beaucoup à faire et nous sommes choqués que le ferroviaire n’ait pas été abordé dans le discours France 2030 du Président Macron”, réagit Sarah Fayolle, chargée de campagne Transports à Greenpeace France.
Le gouvernement français a choisi une autre voie
Si la limitation des vols courts (moins de 1500km), nationaux et européens, ne suffira pas à mettre le secteur aérien sur les rails de l’Accord de Paris, il s’agit d’un point de départ non négligeable. En France, le gouvernement a malheureusement préféré éluder la question de la limitation du trafic aérien. Dans la loi Climat adoptée cet été, l’interdiction des vols courts ne concerne au final qu’une à trois lignes aériennes intérieures sur la centaine existante, avec un bénéfice climatique très limité. Le gouvernement est passé à côté de sujets majeurs comme le fait de garantir que les créneaux aéroportuaires libérés par une telle interdiction ne puissent pas être ré-utilisées pour d’autres liaisons aériennes, potentiellement plus lointaines et plus émettrices.
La seule ligne du gouvernement, c’est l’avion vert, cet avion neutre en carbone qu’Emmanuel Macron promet pour 2030, malgré les avis des experts qui tablent sur 2035 au mieux. Selon l’Association du transport aérien international (IATA), le développement et le déploiement d’un avion “vert” prendra du temps et ne suffira pas à absorber un trafic aérien qui pourrait encore doubler d’ici 2037.
Pour Greenpeace, une interdiction ambitieuse des vols courts doit être portée au niveau européen. En parallèle, il est indispensable de soutenir et d’investir dans le développement et l’amélioration de l’offre nationale et européenne de trains de jour et de nuit, tout en la rendant accessible à toutes et tous.
Si le gouvernement français s’en donnait les moyens, il pourrait se saisir de plusieurs opportunités. Tout d’abord à l’échelle européenne, en soutenant dès maintenant un plan d’action ambitieux sur le ferroviaire, incluant la mise en service d’au moins 30 nouvelles lignes européennes de jour et de nuit à travers l’Europe d’ici 2025, et en s’engageant activement sur ce sujet dans le cadre de la toute prochaine Présidence française de l’Union européenne. Mais aussi à l’échelle nationale, avec le démarrage ces prochains jours des discussions sur les volets écologie et transport du projet de loi de finances 2022 à l’Assemblée nationale. Le projet de loi de finances 2022 pourrait être enfin l’occasion d’acter et de budgétiser l’acquisition de nouvelles voitures de trains de nuit, première étape absolument indispensable pour relancer un véritable réseau de trains de nuit en France et vers l’Europe.