La création d'un aéroport à Notre-Dame-des-Landes est un très vieux projet, qui a débuté en 1963, avec à ce stade initial une vocation intercontinentale (vers les États-Unis). Il est resté en sommeil des années, et est revenu sur le devant de la scène en 2000, sous le gouvernement de Lionel Jospin. Les oppositions qui existaient depuis le départ, venant en particulier d'agriculteurs locaux, se sont renforcées avec le contexte du changement climatique et de la lutte contre les grands projets inutiles. Nous vous avons relaté à de nombreuses reprises ces dernières années les actions des opposants à cet aéroport (rassemblements nationaux, mobilisations locales, ZAD, ...).
Deux clans irréconciliables se sont formés, regroupant des partisans ayant une vision inverse de la société et de son avenir. Une consultation locale a été organisée en 2016, selon des modalités contestées par les opposants (choix de la question, définition du périmètre de la procédure, ...). Finalement, le "oui" l'emporte avec 55% des votants, mais avec une grande disparité des résultats selon les communes.
L'élection présidentielle de 2017 rebat les cartes, avec une équipe moins engagée dans le processus. Des médiateurs sont nommés et remettent leur rapport le 13 décembre 2017. Celui-ci retient deux options « raisonnablement envisageables », un transfert de l’aéroport à Notre-Dame-des-Landes ou son maintien, avec un réaménagement, à Nantes-Atlantique. L'équivalence donnée aux deux options est plutôt une défaite pour les partisans du nouvel aéroport. Emmanuel Macron va devoir trancher dans les semaines à venir, ce sera un choix éminemment politique. Il peut être certain de se faire des ennemis irréconciliables, quel que soit son choix. La tendance semble être à l'abandon du transfert à Notre-Dame-des-Landes, mais rien n'est joué tellement les enjeux sont de taille et les avis tranchés.
Voici l'analyse de France Nature Environnement, engagée dans la lutte contre l'aéroport.
La mission de médiation nommée par le premier ministre concernant le projet d’aéroport du Grand Ouest à Notre-Dame des Landes vient de rendre son rapport. Après analyse des données afférentes aux différentes options, les médiateurs donnent tous les éléments pour privilégier l’aménagement de l’aéroport existant près de Nantes, plutôt que de construire un deuxième aéroport. France Nature Environnement appelle le Gouvernement à prendre une décision courageuse.
Un constat sans appel
France Nature Environnement et ses associations membres (FNE Pays de Loire, Bretagne Vivante, LPO 44 et Eau-et-Rivières de Bretagne) ont participé activement aux travaux de la mission de médiation. Le mouvement salue la qualité du travail réalisé par les médiateurs. Ce rapport écarte les leurres, clarifie les coûts, éclaire les angles morts afin d’aider à identifier la moins mauvaise solution entre rénovation de Nantes Atlantique et construction d’un nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes, à 23 km de Nantes.
À sa lecture, les arguments en faveur de la construction d’un nouvel aéroport tombent les uns après les autres : non, le trafic aérien n’est pas incompatible avec la préservation du Lac de Grand-Lieu. Non, le bruit ne va pas augmenter, ni empêcher les projets immobiliers au centre de Nantes. Non, la rénovation n’est pas plus coûteuse que le transfert puisque la nouvelle estimation financière diminue de moitié le coût estimé par la Direction Générale de l'Aviation Civile (DGAC) en 2013.
Renoncer au projet de nouvel aéroport : une décision courageuse et nécessaire
Ce rapport clarifie également nombre d’enjeux mis en avant par les associations et trop longtemps écartés. Le Gouvernement possède désormais tous les éléments pour prendre sa décision en regardant vers l’avenir, et acter l’abandon du projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes. Il doit faire preuve de courage, afin de renoncer à l’obstination des précédents gouvernements de ne jamais remettre en cause un projet inadapté. Cette décision innovante réconcilierait enfin « écologie » avec « économie » et permettrait de lancer un processus de co-élaboration d’un projet de territoire s’inscrivant dans une réelle transition écologique et solidaire.
Pour un projet de territoire co-construit
Les choix à venir ne doivent signifier ni la victoire des uns, ni la défaite des autres. Il n’est aujourd’hui plus possible d’envisager une société pérenne sans l’intégration des enjeux climatiques, ceux liés à la biodiversité et les nouvelles solidarités humaines à inventer pour y faire face.
Une rénovation de Nantes Atlantique sobre en espace et économe en financement public devra nécessairement prendre en compte la question du bruit, bien moindre dans son ampleur que celle agitée pendant des années, avec des solutions possibles pour pouvoir enfin la traiter. Du côté de Notre-Dame-des-Landes, le retour à la normale ne sera possible que si un processus concerté s’ouvre sur la question foncière et agricole, où puisse s’enraciner un véritable projet collectif agro-écologique, où chacun trouve sa place.
Michel Dubromel, président de France Nature Environnement, conclut : « France Nature Environnement et son mouvement associatif appellent solennellement le Gouvernement à prendre une décision courageuse en faveur de la modernisation de l’aéroport actuel. Celle-ci marquera la volonté du président Macron de faire de la transition écologique et solidaire l’une des priorités du quinquennat. Nous avons besoin d’un nouveau modèle de société assumant les défis sociaux et environnementaux pour notre avenir et celui de nos enfants ».