Communiqué du Réseau "Sortir du Nucléaire" le 26 juillet 2021.
Plus d’un mois après le signalement d’une situation radiologique inquiétante sur le réacteur n°1 de l’EPR de Taishan liée à la détection d’assemblages de combustible non étanches contaminant le circuit primaire, la situation reste préoccupante.
Ce jeudi 22 juillet 2021, dans un communiqué publié suite à un conseil d’administration avec son partenaire chinois CGN [1], EDF a indiqué qu’après avoir pris connaissance des données qui lui ont été transmises, « les paramètres radiochimiques de l’eau du circuit primaire demeurent en-deçà des seuils réglementaires en vigueur ». Mais selon les informations du Parisien, le seuil autorisé de concentration des gaz radioactifs dans le circuit primaire à Taishan est plus de deux fois supérieur au seuil français, et cette concentration ne cesse d’augmenter [2]. EDF a précisé que si une telle situation survenait en France, le réacteur serait mis à l’arrêt.
Mais l’entreprise TNPJVC, qui gère l’EPR de Taishan et dont EDF est actionnaire à 30 %, n’a apparemment pas l’intention d’arrêter le réacteur. Quant à l’Autorité de sûreté nucléaire chinoise, plutôt que de demander la mise à l’arrêt du réacteur, elle aurait, selon les informations de CNN, multiplié par deux les seuils de rejets autorisés début juin, sans que la valeur de ces seuils ne soit connue [3]. Cette fuite en avant de l’exploitant et de l’Autorité de sûreté chinoise est particulièrement inquiétante, laissant craindre des risques pour les riverains et surtout pour les personnes qui travaillent sur le site.
Cette situation démontre bien que le risque nucléaire est démultiplié dans un pays qui ne dispose pas de contre-pouvoirs. Pour autant, elle pose aussi de nombreuses questions concernant l’attitude de l’industrie nucléaire française !
Plus d’un mois après, aucune information n’a filtré quant à l’origine du problème : résulte-t-il du mode de pilotage de l’exploitant chinois ? D’un problème de conception du réacteur par EDF ? D’un défaut de fabrication des gaines de combustible par Framatome (filiale d’EDF) ? Pourtant actionnaire et conceptrice du réacteur, EDF n’en dit rien !
Ne risque-t-on pas de retrouver les mêmes problèmes sur l’EPR de Flamanville - problèmes qui viendraient s’ajouter aux multiples malfaçons qui criblent ce réacteur, ou même sur celui d’Olkiluoto ? Et si c’est le combustible nucléaire conçu pour l’EPR par Framatome qui est en cause, celui qui a été livré à l’EPR de Flamanville pourrait-il comporter les mêmes défauts ?
Au regard de ces dysfonctionnements avérés et de ces nouvelles incertitudes, il est totalement irresponsable que le gouvernement ait pu mettre en consultation, le dossier d’autorisation d’exploitation de l’EPR de Flamanville [4] comme si de rien n’était.
Nous rappelons l’urgence de mettre un coup d’arrêt au programme EPR, que ce soit en Chine, en France ou ailleurs, et d’engager une sortie du nucléaire. En période de crise économique, gaspiller des milliards dans une technologie dangereuse et dépassée n’a aucun sens !
Notes
[1] Notons qu’il s’est passé plus d’un mois entre la demande d’organisation d’un conseil d’administration exprimée par EDF le 14 juin et sa tenue le 22 juillet !
[2] Selon le Parisien, ce seuil aurait été relevé à 324 gigabecquerels par tonne d’eau (contre 150 GBq/t en France) ; le 30 mai 2021, la concentration aurait déjà atteint 290 GBq/t !
[3] En France, ces seuils sont fixés à un niveau particulièrement élevé
[4] Dossier par ailleurs extrêmement succinct... et obsolète ; lire notre analyse à ce sujet.