Communiqué de FNE le 17.04.2025
Le processus d’élaboration de la 3è Programmation Pluriannuelle de l’Énergie s’est terminé début avril, avec la fin de la consultation publique du projet de décret. Depuis, le gouvernement a annoncé qu’un examen au Parlement aurait lieu à la fin du mois d’avril, mais sans vote, et que le décret serait ensuite publié.
Cette publication mettrait fin à une période trop longue d’incertitudes pour les acteurs de la transition énergétique. Cependant, pour FNE, la nouvelle PPE ouvre la voie à un avenir énergétique d’un autre siècle : coûteux pour les entreprises et les ménages, peu sobre et surtout fragile, tant que la PPE ne sera pas encadrée par une loi de programmation.
Sobriété, indispensable et pourtant si peu mise à profit
Malgré les beaux discours, le gouvernement rate l’objectif de mettre la sobriété au cœur du projet énergétique de la France. Bien qu’ayant été rehaussé à 30 %, l’objectif de baisse de la consommation reste encore insuffisant pour respecter les engagements européens « Fit for 55 » d’après l’avis même de l’Autorité environnementale (il manquerait 12 points). De même, les mesures pour atteindre cet objectif sont elles aussi insuffisantes, de l’aveu même de la PPE.
Le contexte actuel de rigueur budgétaire ne devrait pourtant pas remettre en cause l’atteinte de cet objectif. Si les moyens actuels ne sont pas pérennisés (MaPrimeRénov’, Plan vélo, …) et si des mesures et moyens supplémentaires (financiers, réglementaires) ne sont pas identifiés rapidement et mis en place, le risque est grand de rater l’objectif et de mettre en difficulté les ménages et entreprises. En ayant recours alors à davantage de moyens de production d’énergie, consommateurs de ressources et de surfaces, c’est la transition écologique dans sa globalité qui serait mise en péril. Serait-ce une manière, en bridant la sobriété, de légitimer six nouveaux EPR puis huit, qui engloutiront au passage l’épargne des ménages et les finances publiques nécessaires à la rénovation énergétique et aux énergies renouvelables ?
Les ENR, variables d’ajustement du nucléaire
Alors qu’elles devraient être au cœur de la politique énergétique au même titre que la sobriété, au regard de leur robustesse technique, des baisses des coûts importantes constatées ces dernières années, des diversités de déploiement possibles, les ENR restent la variable d’ajustement du nucléaire. Elles n’ont même pas d’objectif propre mais sont noyées dans un objectif « décarboné » !
À défaut d’avoir suffisamment encouragé l’électrification des secteurs du bâtiment, de l’industrie et de la mobilité, le gouvernement se retrouve en surcapacité de production électrique. Ce qui devrait nous enjoindre à développer les ENR plutôt que de les mettre en rade en anticipation des besoins futurs et de possibles mises à l’arrêt de réacteurs.
Ne freinons pas le développement des énergies renouvelables ! dans cette PPE pourtant, l’éolien terrestre reste à la traîne et les ambitions pour le photovoltaïque sont revues à la baisse, au profit de grands projets au sol pourtant plus nuisibles pour l’environnement.
Nous regrettons que le gouvernement puisse revenir sur les orientations de la loi APER, du cadre établi antérieurement par la loi Grenelle, et des propositions faites lors de la concertation préalable de la PPE, et priorise les parcs au sol plutôt que les installations sur bâti.
Relance du nucléaire actée, malgré des sommets d’incertitudes
Cette PPE3 acte pour la première fois depuis 2013 sur la base d’un simple discours du président, non pas une sortie progressive du nucléaire, mais sa relance, forte de six puis huit nouveaux EPR 2, dont le design, le financement, le coût pour les entreprises et les ménages, le délai, et le retour d’expérience de Flamanville – qui pour l’instant ne fonctionne pas très bien - ne sont pas connus. Cet engouement nucléaire est assorti de « SMR », petits réacteurs modulaires, qui démultiplient les risques et les déchets radioactifs, dont on ne sait que faire.
Mais ni l’industrie, ni les capacités de financements et encore moins les personnels ne sont disponibles. Il serait donc prudent que la PPE 3 considère d’ores et déjà un plan B permettant l’atteinte des engagements climatiques en cas de défaillance de la relance du nucléaire ou de déconvenues sur la prolongation des réacteurs au-delà de 60 ans. En effet, qu’en est-il des objectifs de la PPE et du maintien du système électrique si quelques vieux réacteurs sont mis à l’arrêt pour raison de sûreté et que les ENR et la sobriété manquent à l’appel, faute de développement suffisant ?
Pour FNE, ces choix, dignes des années 1970, sont irrationnels et à rebours des intérêts des ménages et des entreprises au regard des enjeux sanitaires, financiers et économiques, et aussi des intérêts géopolitiques, puisque de l’amont à l’aval, la filière nucléaire recèle des fragilités, que ce soit pour l’extraction ou le retraitement de l’Uranium.
Prochaine étape, réussir la régionalisation de la PPE
Innovation de la loi Énergie Climat de 2019, cette PPE sera régionalisée d’ici la fin de l’année. Une opportunité pour instaurer une réelle planification spatiale et temporelle des ENR qui ne soit pas simplement réduite à l’identification des zones d’accélération des ENR.
En tant que plan programme, et de fait soumis à évaluation environnementale, cette régionalisation devra s’attacher à rechercher les zones et solutions de moindre impact pour le déploiement des ENR. C’est particulièrement nécessaire pour le photovoltaïque dont les projets au sol sont consommateurs de surfaces, souvent naturelles, agricoles et forestières. Pourtant, aucun dispositif de suivi des surfaces utilisées par les parcs solaires n’est mis en place par les services de l’État. Dès lors, comment régionaliser les PPE ?