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Destructions massives et injustifiées à Gaza : une enquête pour crime de guerre doit être ouverte

Nous avons mené une enquête sur huit mois de destructions par l’armée israélienne à l’Est de Gaza. L’objectif affiché par Israël ? Créer une “zone tampon”, un périmètre de sécurité qui viserait à protéger la population israélienne de nouvelles attaques. Pourtant, notre enquête montre que ces destructions sont injustifiées et contraires au droit international humanitaire. Nous appelons à ce qu’elles fassent l’objet d’une enquête en tant que crime de guerre.  

Après les attaques et les prises d’otages commises par le Hamas le 7 octobre 2023, l’armée israélienne a répliqué dans un déchainement de violences inouïes, au mépris de la vie des civil⸱es palestinien⸱nes.  

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Prétextant des raisons de sécurité, l’armée israélienne a mené une campagne militaire de destructions massives dans la zone à l’Est de Gaza, le long du mur qui démarque le territoire palestinien occupé par Israël. L’objectif affiché est de créer une large zone tampon pour protéger la population israélienne de potentielles nouvelles attaques par le Hamas en détruisant des tunnels et d’autres “infrastructures terroristes”.   

Nous avons mené l’enquête sur huit mois de destructions massives, d’octobre 2023 à mai 2024. Nous nous sommes focalisés sur quatre lieux le long de cette “zone tampon” à Gaza. 

Le Laboratoire de preuves du programme Réaction aux crises d’Amnesty International s’est appuyé sur des images satellites qui révèlent l’ampleur de la destruction et a vérifié 25 vidéos filmées le long de la ligne de démarcation. Nous avons également recueilli des témoignages d’habitant·es et des agriculteurs et agricultrices touchés par ces bombardements.  

Nos recherches nous ont permis de conclure que dans les quatre zones enquêtées, les destructions sont injustifiées et contraires au droit international humanitaire. Nous appelons la justice internationale à enquêter sur ces destructions en tant que crimes de guerre.  

La campagne de ruine incessante de l’armée israélienne à Gaza est une campagne de destruction injustifiée. Nos recherches montrent que les forces israéliennes ont détruit des bâtiments résidentiels, forcé des milliers de familles à quitter leurs foyers et rendu leurs terres inhabitables

Erika Guevara-Rosas, directrice générale de la recherche, du plaidoyer, des politiques et des campagnes à Amnesty International

Des destructions délibérées et systématiques par l’armée israélienne  

Au cours de notre enquête, nous avons pu identifier des terres récemment défrichées par les attaques israéliennes le long de la limite Est de Gaza, sur une surface d’environ 1 à 1,8 kilomètre de large. Cette « zone tampon » élargie le long de la ligne de démarcation avec Israël, couvre environ 58 kilomètres carrés, ce qui représente environ 16 % de l’ensemble de la bande de Gaza occupée. 

En mai 2024, plus de 90 % des bâtiments de cette zone (plus de 3 500 structures) semblaient détruits ou gravement endommagés, et 59% des terres agricoles de la région ont vu leur santé se détériorer, les menaçant de devenir inexploitables. Des fermes ont été rasées au bulldozer et des immeubles d’habitation ont été démolis. Des milliers d’habitations et des terres ont été rendues inhabitables. 

Le droit international humanitaire est contraignant pour toutes les parties à un conflit armé. Il vise à atténuer autant que possible les souffrances humaines en temps de guerre.  

Dans le cadre de notre enquête sur les destructions commises par l’armée israélienne pour créer une “zone tampon”, nous avons relevé plusieurs éléments qui enfreignent le droit international humanitaire. 

D’une part parce que le droit international humanitaire interdit la destruction des biens d’un adversaire, sauf si celle-ci est justifiée par une nécessité militaire impérieuse, c’est-à-dire un objectif militaire légitime.   

Or, dans les quatre zones sur lesquelles nous avons enquêté, les destructions sont intervenues après que l’armée israélienne avait pris le contrôle opérationnel des zones. Les destructions n’ont pas été causées par des combats directs entre l’armée israélienne et le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens. Au contraire, dans ces parties de la bande de Gaza, des structures ont été délibérément et systématiquement démolies par l’armée israélienne. 

La destruction d’une structure servant de couverture à un ennemi pour tirer sur les forces de l’autre partie pendant un combat actif peut constituer un objectif légitime. Cette application tactique ne s’applique pas dans les cas enquêtés car, au moment des démolitions, les forces israéliennes contrôlaient les zones et les combats avaient en grande partie cessé. 

Ensuite parce que les attaques directes contre des biens de caractère civil sont également interdites. Ces attaques constituent un crime de guerre. Lorsque nous avons par exemple enquêté sur le quartier de Chajaya, nos preuves ont démontré que des bâtiments comme des écoles et des mosquées ont été prises pour cibles par l’armée israélienne. L’armée israélienne a affirmé que certains de ces bâtiments abritaient des armes, des munitions et des conduits de tunnel, sans fournir de preuves. 

Bien que certaines structures aient probablement déjà été utilisées par des groupes armés, l’éventuelle utilisation future de biens de caractère civil par des groupes armés, ne suffit pas à transformer des logements, des écoles ou des mosquées en objectifs militaires. La démolition punitive, à titre de sanction collective, de biens de caractère civil au seul motif qu’ils ont été utilisés par des groupes armés est interdite. 

Enfin, ces destructions constituent également des crimes de guerre en tant que sanction collective infligée à la population palestinienne. La Quatrième Convention de Genève l’indique : « Aucune personne protégée ne peut être punie pour une infraction qu’elle n’a pas commise personnellement. Les peines collectives, de même que toute mesure d’intimidation ou de terrorisme, sont interdites. » 

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La carte de Gaza ci-dessus met en évidence les dommages et destructions ayant eu lieu entre octobre 2023 et mai 2024 à une distance d’un kilomètre de la barrière de séparation. Plus de 90 % des bâtiments ont été gravement endommagés ou détruits, et la santé de 59 % des cultures a été considérablement détériorée dans la zone.

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