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Israël : les groupes armés palestiniens doivent rendre des comptes pour les atrocités commises

Publié le 12.10.2023 par Amnesty International

Nous avons enquêté sur l’escalade des violences depuis une semaine dans la région. Après avoir analysé des vidéos et récolté des témoignages, nous publions notre première synthèse de recherches depuis le 7 octobre. Voici ce que nous dénonçons. 

 

Le Hamas (Mouvement de la résistance islamique) et d’autres groupes armés palestiniens ont bafoué de manière flagrante le droit international et fait preuve d’un mépris effrayant pour la vie humaine, en se livrant à des crimes cruels et brutaux, notamment des exécutions sommaires de masse et des prises d’otages, et en procédant à des tirs de roquettes aveugles sur Israël. Les éléments de preuve continuent d’affluer sur les horreurs qui se sont déroulées dans le sud d’Israël et nos équipes poursuivent leurs investigations en vue de déterminer toute l’ampleur des crimes relevant du droit international.

« Les informations étayées concernant les crimes de guerre commis par Israël n’excusent pas les actes abominables des groupes armés palestiniens et ne les dispensent pas de s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu du droit international, à savoir respecter les principes fondamentaux d’humanité et de protection de la population civile » a réagit Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International.

Des attaques illégales

Nous avons analysé des vidéos effrayantes du premier jour des attaques, le samedi 7 octobre. 

Les attaques contre Israël ont débuté par un barrage de tirs de roquettes depuis Gaza, suivi d’une incursion du Hamas et de groupes armés palestiniens en Israël.

Des milliers de roquettes ont atterri dans plusieurs régions au centre et dans le sud d’Israël, atteignant même Tel-Aviv. Ces attaques illégales ont tué à la fois des Israélien·ne·s et des Palestinien·ne·s. Elles ont aussi frappé des villages palestiniens non reconnus dans la région du Néguev/Naqab, faisant au moins six morts, dont cinq enfants. Ces populations marginalisées vivent déjà dans des situations précaires, sans possibilité de s’abriter.

Des civils tués délibérément

Sur les vidéos analysées par le Laboratoire de preuves du programme Réaction aux crises d’Amnesty International, on peut également voir des combattants palestiniens, le premier jour des attaques, en train de tirer délibérément sur des civil·es et d’en prendre en otages, notamment autour des quartiers résidentiels israéliens proches de la bande de Gaza, le 7 octobre.

Des vidéos filmées au kibboutz de Beeri et analysées par nos équipes montrent deux hommes en tenue militaire tirer à bout portant sur une voiture, tuant le chauffeur et deux passagers avant d’entrer dans la communauté. On voit ensuite deux hommes armés emmener les trois corps à bord d’un véhicule.

Sur des images filmées plus tard ce même jour, six hommes en tenue militaire emmènent quatre civil·es qui ont les mains liées derrière le dos. Une autre vidéo filmée au même endroit montre les corps sans vie de ces civil·es.

Des vidéos contenant des images tout aussi choquantes, filmées dans les kibboutz de Kfar Aza, de Reim et le long de la route 232 ont été vérifiées : on y voit des hommes armés tirer à bout portant sur des voitures et sur un civil caché dans un abri anti-bombes.

La terrible attaque du festival de musique Nova

Lors d’une attaque des plus horribles au festival de musique Nova, au moins 260 civil·es ont été tués, tandis que d’autres sont toujours portés disparus : on dénombre au moins 260 morts.

L'attaque a débuté vers 7 heures ou 7h30 du matin, par un déluge de roquettes tirées depuis Gaza, suivi par une incursion de combattants de groupes armés. Le Laboratoire de preuves du programme Réaction aux crises a pu vérifier le lieu et l’heure de 18 vidéos, principalement filmées par des survivant·es. L’une de ces vidéos au moins semble avoir été filmée par des membres des groupes armés impliqués.

Sept vidéos authentifiées montrent des hommes armés ouvrir le feu sur des civil·es, avec comme bruit de fond des tirs ininterrompus. Cinq vidéos montrent des personnes en train de tenter de fuir, en traversant un champ voisin ou en se cachant derrière des buissons. Dans une vidéo, un homme armé tire directement sur un civil étendu au sol. Dans une autre vidéo, des hommes armés ouvrent le feu sur des voitures qui tentent de fuir le site du festival. Cinq vidéos montrent des prises d’otages.

Nous nous sommes entretenus avec une victime âgée de 22 ans. Dès le début de l’agitation, il a couru vers une zone boisée, où il a creusé un trou avec les mains et s’est enterré au milieu des arbres, se servant de tout ce qu’il trouvait pour recouvrir son corps. Il y est resté six heures et pendant ce laps de temps, il a entendu des tirs incessants. À un moment, il a levé la tête, juste assez pour voir des combattants tirer dans le dos de personnes qui s’enfuyaient.

Il a raconté :

Puis, j’ai vu qu’ils jetaient du carburant partout pour brûler la zone, et j’ai entendu et senti le feu. J’ai alors réalisé que je n’avais pas le choix : soit je partais et je me faisais tirer dessus, soit j’étais brûlé dans cette cachette. Je n’arrive pas à dormir la nuit et je ne peux pas rester seul. Chaque fois que je ferme les yeux, je revois toute l’horreur de la scène – des cadavres partout, des personnes coincées dans leur véhicule en flammes, l’odeur du sang. 

Un jeune homme de 22 ans présent au festival de musique Nova

Yaacov Argamani, dont la fille Noa a été prise en otage, a déclaré qu’il a commencé à s’inquiéter samedi matin, lorsqu’il a entendu les sirènes et qu’il n’a pas réussi à contacter Noa :

« J’ai senti que quelque chose n’allait pas. J’ai eu un mauvais pressentiment. Je ne saurais pas dire pourquoi, mais je suis un père, et vous savez les parents sentent parfois que quelque chose ne va pas, sans pouvoir l’expliquer. Alors j’ai essayé de la contacter, mais en vain. »

Yaacov a appelé les hôpitaux à la recherche de sa fille, mais elle ne s’y trouvait pas. Il a ensuite reçu un appel téléphonique de quelqu’un qui lui a dit avoir vu une vidéo de Noa emmenée sur une moto vers la bande de Gaza. Il a déclaré à Amnesty International : « Je ne pouvais pas y croire, je ne l’ai admis que plus tard, lorsque j’ai vu d’autres vidéos, où je la voyais sur une moto, son petit ami dans un autre véhicule à côté d’elle, emmenés dans la bande de Gaza. Je ne fais que penser à elle. »

Uri David, dont les filles Tair et Hodaya David sont toutes deux portées disparues, a déclaré lors d’une conférence de presse le 9 octobre :

« Cela fait 48 heures et de nombreuses familles ne savent rien. Rien du tout. J’étais au téléphone avec mes filles hier matin. Elles étaient allongées par terre... J’entendais des bruits de fond, on se serait crus dans un champ de tir, des cris en arabe tout autour. J’ai entendu tout ça et je leur ai dit de se mettre par terre et de s’allonger, face à face, et de se tenir la main. Ne respirez même pas. Retenez votre respiration. Ce n’était pas facile. »

J’étais au téléphone avec elles pendant une trentaine de minutes. Jusqu’à ce que j’entende quatre respirations, très essoufflées, puis – plus rien. Je demande au monde entier de regarder ce qui se passe. Nous devons récupérer nos enfants, dès que possible. 

Uri David, dont les filles Tair et Hodaya David sont toutes deux portées disparues

 
 

Nous appelons à la libération de tous les otages

Outre les horribles exécutions sommaires de civils qui ont eu lieu à plusieurs endroits dans le sud d’Israël, au moins 150 otages ont été emmenés à Gaza, dont des enfants et des étrangers, selon les responsables israéliens.

L’enlèvement de civil·es est interdit par le droit international et la prise d’otages constitue un crime de guerre.

Tous les civil·es retenus en otage doivent être libérés immédiatement, sans condition et sains et saufs. Toutes les personnes retenues prisonnières doivent être traitées avec humanité, conformément au droit international, et bénéficier de soins médicaux.

Tous les civil·es qui ont été kidnappés, notamment les enfants, doivent être libérés immédiatement. Ces crimes doivent faire l’objet d’investigations dans le cadre de l’enquête en cours de la Cour pénale internationale (CPI) sur les crimes commis par toutes les parties au conflit actuel.

Alors que la riposte des forces israéliennes s’abat sur Gaza, Amnesty International insiste sur le fait qu’un bain de sang contre la population civile à Gaza et des sanctions collectives ne permettront pas de garantir la sécurité ni de rendre justice 

Agnès Callamard

Nos demandes

➡️ Nous demandons à la communauté internationale de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte de protéger pleinement les droits fondamentaux des Palestinien·nes et des Israélien·nes, et de garantir justice et réparations aux victimes.

➡️ Nous demandons aussi aux autorités israéliennes, ainsi qu’aux groupes armés palestiniens, de respecter strictement le droit international humanitaire : avant tout en faisant preuve d’humanité dans la conduite des hostilités, en prenant les précautions nécessaires pour réduire au minimum les dommages causés aux populations civiles et aux biens à caractère civil, et en s’abstenant de lancer des attaques illégales et d’infliger des sanctions collectives aux civil·e·s.

➡️ Nous exhortons tous les groupes armés palestiniens à Gaza de libérer tous les otages civils immédiatement et sans condition.

➡️ Nous demandons une nouvelle fois à Israël de mettre fin au blocus illégal de Gaza, instauré depuis 16 ans, et de suspendre sur-le-champ les restrictions accrues imposées au cours de la semaine passée. Israël doit mettre un terme aux attaques illégales qui tuent ou blessent des civils et détruisent des habitations et des infrastructures civiles.

➡️ Enfin, le gouvernement israélien doit s’abstenir d’inciter à la violence et d’alimenter les tensions en Cisjordanie occupée, y compris à Jérusalem-Est, et garantir la sécurité de tous les civil·e·s vivant sous son contrôle.

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Des soldats israéliens portent le corps d'une victime d'une attaque par des militants de Gaza au kibboutz Kfar Aza, dans le sud d'Israël, où un massacre aurait été perpétré par le Hamas, le 10 octobre 2023. REUTERS/Ronen Zvulun 

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