8 ans après les révélations du scandale du dieselgate, le problème n’a toujours pas été réglé en France, où 3,3 millions de voitures diesel assez récentes roulent encore sur nos routes en émettant beaucoup plus de polluants que la norme sous laquelle elles ont été vendues. Trois associations ont déposé plainte auprès du gouvernement, l’appelant à agir pour nettoyer ce problème qui a un lourd impact sur notre santé.
Des émissions excessives sur plus de 200 modèles
Depuis 2015, les émissions de nombreux modèles diesel ont été testées par plusieurs instances publiques ou indépendantes en Europe. L’analyse de ces tests, publiée le 23 mars 2023 par le Conseil international pour des transports propres (ICCT), montre qu’au moins 77% des modèles présentent des émissions «suspectes» et 40% des modèles des niveaux d’émissions «extrêmes», laissant à penser qu’ils sont équipés de dispositifs interdits d’invalidation des systèmes de réduction des émissions. Il s’agit principalement de voitures diesel vendues entre septembre 2011 et septembre 2019, de norme Euro 5 et 6, que l’on retrouve dans la gamme de presque toutes les marques.
Aux Etats-Unis, les autorités avaient agi avec rapidité suite aux révélations du dieselgate et imposé aux constructeurs la mise en conformité ou le remboursement des véhicules aux moteurs truqués. En France, des tests avaient été réalisés par l’état, démontrant l’ampleur du problème, sans qu’une action de réparation du problème ne soit imposée aux constructeurs. C’est donc notre santé qui continue à payer les conséquences d’une crise non traitée.
Les conclusions de la commission d’enquête (la commission dite «Royal») avaient été sans appel, révélant en juillet 2016 que la plupart des constructeurs étaient concernés et que les émissions étaient bien souvent plusieurs fois plus élevées que les normes en vigueur pour le dioxyde d’azote.
Nos poumons exposés
Le dioxyde d’azote, un gaz émis principalement par les transports et en particulier par le diesel, est responsable de 7 000 décès chaque année en France d’après Santé Publique France, soit deux fois plus que les accidents de la route. L’inaction des autorités françaises par rapport à ce scandale connu et documenté expose un grand nombre de personne à un pollution excessive, qui cause des décès et engendre aussi un grand nombre de maladies respiratoires, en particulier chez les plus fragiles (enfants et personnes de plus de 65 ans) et les populations précaires, souvent contraintes d’habiter près d’axes routiers.
Nouvelle obligation pour les états
L’obligation morale envers notre santé n’a pas suffi pour que la France agisse avec fermeté envers les constructeurs automobiles. Une nouvelle obligation, légale cette fois-ci, devrait inciter notre pays à le faire. En effet, une loi européenne entrée en vigueur en septembre 2020 (règlement 2018/858) oblige les Etats-membres à tester la conformité des véhicules en circulation et à agir sans délai pour contraindre les fabricants à prendre des mesures correctives si nécessaire.
4 mois pour agir
ClientEarth, France Nature Environnement (FNE) et Consommation Logement Cadre de Vie (CLCV) ont déposé une plainte auprès de de l’Etat français pour obtenir des informations sur les actions engagées ou prévues par le gouvernement. Nos associations donnent 4 mois au gouvernement pour répondre à notre plainte, aussi étayée que factuelle. Nous espérons que cette démarche poussera la France à exiger rapidement la mise en conformité des millions de véhicules concernés qui circulent actuellement sur nos routes, au frais des constructeurs bien évidemment et pas des consommateurs, qui ont déjà été trompés sur leur achat. Selon la réponse du gouvernement, nous évaluerons la pertinence d’aller plus loin, en déposant une plainte auprès de la justice, pour tenter de mettre fin à une situation qui impacte tous les jours la santé de toutes et tous, par des maladies et des décès trop nombreux.
Nous souhaitons aussi, comme cela a été fait aux Etats-Unis qu’un fonds, abondé par les constructeurs, soit créé. Ce fonds permettra de financer l’accès à des véhicules réellement plus propres, en privilégiant les personnes à faible revenus et le passage à des solutions alternatives à la voiture (abonnement aux transports en commun, à un club d’autopartage, aide à l’achat de vélos électriques ou cargo…).