Le 14 novembre 2018, la France s’était montrée pionnière en publiant la première stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée (SNDI). Son ambition : mettre un terme à la déforestation importée de la France à l’horizon 2030. Mais trois ans plus tard, les espoirs sont partis en fumée : la stratégie n’a été suivie d’aucun effet, faute d’ambition et de volonté politiques.
Afin de nourrir ses élevages de volailles, de vaches et de porcs, la France importe plus de trois millions de tonnes de soja par an, dont deux millions en provenance du Brésil, sans aucune garantie de l’absence d’impact environnemental de ces cultures. Pourtant, nos importations exercent une pression catastrophique sur les écosystèmes d’Amérique du Sud. Les données publiées le 5 novembre par l’Institut brésilien de recherche spatiale (INPE) font état de 796 km² déforestés en Amazonie – soit près de huit fois la superficie de Paris – pour le seul mois d’octobre 2021.
Greenpeace demande au gouvernement français de prendre de toute urgence des mesures contraignantes pour mettre en œuvre ses engagements et garantir que le soja importé en France ne contribue pas à la déforestation ou à la destruction d’écosystèmes naturels à l’autre bout du monde.
“Si les objectifs de la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée dont la France s’est dotée étaient ambitieux, trois ans après son adoption le constat est amer, déplore Cécile Leuba, chargée de campagne Forêts à Greenpeace France. Cette stratégie n’a pas porté ses fruits, car le gouvernement refuse de prendre des mesures juridiquement contraignantes et préfère miser, en dépit des leçons tirées ces dernières années, sur le bon-vouloir des entreprises. Alors que les annonces sur la protection des forêts se sont multipliées à Glasgow lors de la COP26, l’échec de la SNDI prouve une fois de plus que signer des accords n’est pas suffisant et que ces annonces sont vouées à l’échec si les Etats sont aux abonnés absents lors de la mise en œuvre de ces engagements.”
Avant la fin de ce quinquennat, le gouvernement français a une ultime chance d’agir concrètement pour la protection des forêts. Durant le premier semestre 2022, la France assurera la présidence de l’Union européenne. Greenpeace attend du gouvernement qu’il œuvre activement à Bruxelles : la France doit défendre une position ambitieuse pour que la proposition de législation sur les forêts, dont la Commission européenne devrait dévoiler la première mouture le 17 novembre, permette véritablement de mettre un terme à la déforestation due à la consommation européenne. Pour être efficace, cette législation doit prendre en compte tous les écosystèmes et toutes les matières premières sans exception, et garantir la protection des droits des peuples autochtones.
Pour porter une telle ambition au sein des discussions européennes et être crédible auprès des Etats membres, la France devra prouver son engagement à domicile et prendre des mesures fortes pour mettre en œuvre sa stratégie nationale de déforestation importée.