Communiqué de Greenpeace
Elles sont de retour : les algues vertes prolifèrent à nouveau et comme chaque année sur les plages de Bretagne mais aussi de Normandie. Un phénomène survenu pour la première fois en 1971, et qui a depuis pris de l’ampleur. Les causes et les désastreuses conséquences environnementales et sanitaires de ces échouages massifs, documentées dans notre dernier rapport, sont bien connues des autorités publiques. Pourtant, ces dernières n’ont toujours pas pris les mesures nécessaires pour mettre un terme à ce phénomène. Pire : alors que le lien entre algues vertes et industrialisation de l’élevage ne fait aucun doute, le gouvernement tente de faciliter encore l’installation des fermes-usines sur le territoire breton, qui compte déjà beaucoup trop d’animaux d’élevage.
Les algues vertes : un grave problème écologique et sanitaire pour la Bretagne
Les algues vertes polluent chaque été les plages bretonnes. Leur prolifération pose un grave problème environnemental, puisqu’elle peut provoquer une asphyxie de la faune et de la flore aquatiques. Elle constitue également une lourde menace pour la santé publique : la décomposition de ces algues émet des gaz toxiques à des concentrations pouvant être mortelles pour l’être humain en quelques minutes d’inhalation. Depuis plusieurs décennies, de nombreuses morts suspectes d’animaux et d’humains ont été constatées.
La mort de Thierry Morfoisse compte parmi les plus marquantes d'entre elles. Employé chargé de transporter des algues vertes, il est décédé sur son lieu de travail en 2009. Le lien entre son activité et sa mort n’a été reconnu qu’en 2018. Autre exemple: la mort d’un joggeur, décédé en 2016 dans une zone des Côtes-d’Armor où les algues vertes pullulent. Les autorités refusent de reconnaître un quelconque lien entre sa mort et la présence d’algues vertes. Pourtant, les circonstances de celle-ci jettent le trouble. C’est en effet dans cette zone que 36 sangliers avaient été retrouvés morts des suites d’une intoxication en 2013. Là encore, les autorités n’ont pas reconnu un lien direct entre la présence des algues vertes et ces 36 morts simultanées.
La dangerosité sanitaire et environnementale de la prolifération des algues vertes ne fait pas l’ombre d’un doute, mais le gouvernement s’obstine à ne pas reconnaître et appréhender le problème.
Les algues vertes sont alimentées par l’élevage industriel breton
Ce silence coupable trouve sa justification dans les causes de la prolifération des algues vertes, imputable à l’élevage industriel de la région. L’industrialisation de l’élevage breton, ininterrompue depuis l’après-guerre et favorisée entre autres par la Politique agricole commune (PAC), ne semble pas faiblir : les élevages y sont toujours de moins en moins nombreux, mais de plus en plus étendus et peuplés. La Bretagne est ainsi la première région de France pour la production de lait, d’œuf, et de viande de porc, de volaille et de veau. Or les élevages industriels, en raison du nombre trop important d’animaux qu’ils comportent, rejettent énormément de nitrates dans les sols et les cours d’eau à travers les effluents (déjections animales) d’élevage. Résultat : les eaux bretonnes se situent parmi les plus chargées en azote d’Europe, avec des concentrations de nitrates par litre près de 10 fois supérieures à une situation sans pollution humaine. Ces nitrates font proliférer ces algues dans les eaux bretonnes en des quantités bien supérieures à la normale. Si les efforts d’un certain nombre d’agriculteurs volontaires ont effectivement permis des progrès modérés, les concentrations de nitrates restent bien au-dessus de celles des années 1980 et plus de trois fois supérieures au taux de 10 mg/l susceptible de conduire à une baisse des marées vertes.
L’Etat coupable de faciliter l’installation des fermes-usines
Les enjeux liés à cette crise sont lourds : l’activité économique de la Bretagne est tirée par son élevage industriel, qui alimente les algues vertes, et par le tourisme régional, qui est directement impacté par les échouages massifs sur les plages bretonnes et leur médiatisation.
En refusant d’engager la transition écologique de l’élevage industriel, solution la plus efficace pour lutter contre les algues vertes, les autorités publiques semblent faire prévaloir les intérêts économiques sur les intérêts sanitaires et environnementaux. Elles n’ont aucun intérêt à ce que le problème ne s’ébruite, et tentent d’étouffer les affaires qui en découlent. Le silence et l’inaction de l’Etat sur la prolifération annuelle des algues vertes sont coupables, et symbolisent l’inefficacité du gouvernement en matière de défense de l’environnement.
Pire, le gouvernement appauvrit depuis plusieurs années l’encadrement de l’autorisation d’élevages industriels sur les côtes bretonnes. En effet, la réglementation ICPE (installation classée pour la protection de l’environnement) qui régit l’autorisation des exploitations contenant un nombre d’animaux élevé a été considérablement affaiblie, marquant le manque de volonté et d’ambition des autorités en la matière. Un nouveau décret déposé le 24 décembre 2018 vise à encore simplifier leur autorisation dans les régions les plus concernées.
Les fermes-usines risquent ainsi de continuer à envahir la Bretagne et les algues vertes de poursuivre leur conquête estivale de ses plages. Il est temps que cette situation cesse. Dénoncez avec nous ce scandale en rejoignant notre mouvement pour un élevage vert.