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France : les ventes d’armes complices

Communiqué d'Amnesty International

Alors que se tient l’un des plus grands salons de l’armement à Paris du 13 au 17 juin, retour non-exhaustif sur les récentes ventes d’armes du « pays des droits de l’homme ».

LE DOUBLE DISCOURS DE LA FRANCE

Alors que la France se classe au 4ème rang mondial des puissances exportatrices d’armement tout segment confondu, elle est aussi un de ces pays qui ont soutenu fortement l’adoption du Traité sur le commerce des armes.

Il ne s’agit pas […] Parce que nous sommes un pays qui fabrique des armements et les exporte, d’abandonner nos convictions et nos principes. Les droits de l’Homme, la démocratie, la lutte contre la corruption sont en toutes occasions rappelés dans mes déplacements, par moi-même, par le Premier ministre, par les membres du Gouvernement.»

François Hollande devant les Ambassadeurs français, le 25 août 2015

Mais entre la nécessité exprimée d’un commerce des armes plus responsable et la réalité, un fossé existe.

REPRESSION EN EGYPTE : RENAULT COMPLICE ?

Ainsi, l’entreprise Renault Trucks Defense (RTD) sera présente sur le salon, forte de ses ventes d’armes à l’Egypte. Alors que le pays connaît l’une des phases répressives les plus dures depuis 2011, voire de son histoire, l’entreprise y a accru ses ventes.

En 2012, Renault Trucks Defense a remporté quatre appels d’offres pour l’équipement de l’armée (...) Si les composantes de ces contrats sont intégralement réalisées, RTD sera dans quelques années le premier partenaire français de l’armée égyptienne. »

Gérard Amiel - PDG de l’entreprise Renault Trucks Defense devant l’assemblée nationale en 2012

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De fait, près de deux cent véhicules de combat et de maintien de l’ordre ont été livrés depuis 2012. Alors que l’entreprise présentait pour la première fois son camion blindé de maintien de l’ordre (MIDS) au salon Milipol 2011, l’Egypte en achetait dès 2012, plusieurs dizaines.

Nous menons actuellement des négociations portant sur d’autres matériels – camions, blindés légers, blindés moyens. L’année 2015 a été faste et l’année à venir se montre très intéressante en termes de conclusion de contrats.»

Le PDG de RTD devant l’Assemblée nationale, le 27 janvier 2016

La France comme d’autres pays de l’UE bafoue les dispositions du Traité sur le commerce des armes en continuant de fournir à l’Egypte les outils de sa terrible répression ainsi que la Position commune de l’UE sur les exportations d’armement.

La France a livré en 2015 pour plus d’1,2 milliard d’euro de matériels de guerre à l’Egypte et a émis une licence pour un montant de 95 millions d’euros correspondant à des véhicules blindés ainsi que des licences pour plusieurs millions d’euros d’armes et de munitions.

CONFLIT AU YEMEN : DES ARMES FRANÇAISE DANS LES MAINS DE LA COALITION

Le conflit au Yémen a déjà fait plus de 3000 morts civils et 21 millions de personnes ont besoin d’une assistance humanitaire. Cette situation alarmante n’empêche pas la France de continuer à fournir du matériel à la coalition.

C’est le cas de l’entreprise Nexter.  L’entreprise a livré ces dernières années des véhicules blindés de combat Aravis, ainsi que le canon autotracté Caesar de 155 mn. La première commande de véhicules Aravis remonte à 2012 pour 73 unités. Au final, ce sont 264 véhicules qui ont été commandés. 115 ont été livrés en 2015.

Au niveau global, la France a livré pour près de 900 millions d’euros d’armement au royaume saoudien en 2015 et des licences ont été délivrées la même année pour près de 1,7 milliards d’euros incluant des armes, munitions, des véhicules blindés, « des agents chimiques ou biologiques toxiques », des navires de guerre, des aéronefs, plus de 700 fusils de précision. Plus de 5 millions d’euros d’armements non identifiés ont été également livrés sous forme de cessions onéreuses. Le pays est le premier client de la France.

 

Nexter a conçu et produit le char de combat Leclerc. 

"Pour ce qui est des chars Leclerc, […] leur implication au Yémen a fortement impressionné les militaires de la région »Stéphane Mayer - PDG de Nexter devant l’Assemblée nationale le 21 avril 2016

Le seul pays en dehors de la France qui possède cet équipement sont les Emirats arabes unis. De 1995 à 2005,  376 chars ont été livrés au pays. Nexter assure leur maintenance et fournit également les munitions. 

En 2015, la France a livré des armements pour près de 294 millions d'euros aux Emirats arabes unis.

Le soutien français aux membres de la coalition comme l’Arabie saoudite ne s’est jamais démenti malgré l’utilisation avérée par exemple d’armes à sous-munitions

LES ZONES D’OMBRE DES VENTES D’ARMES FRANÇAISES

Que connaissons-nous des transferts d’armes de la France en dehors des grands contrats ? Ainsi la France ne fournit pas seulement du matériel neuf. Elle fournit également du matériel de seconde main, notamment du matériel russe via la Sofema, allant du fusil au char de combat

Comment savoir ce que la France fournit à ces acteurs qui ne sont pas étatiques et qui ne font l’objet d’aucune information publique ? Dans cette perspective, comment expliquer que des missiles MILAN et HOT produits par MBDA se retrouvent entre les mains de l’Etat Islamique.

Le rapport au Parlement sur les exportations d’armement produit sur une base annuelle par le ministère de la Défense, ne fournit aucune précision sur les types et quantités de matériels exportés, sur leur utilisation finale ni sur leurs destinataires finaux..

La France a pourtant une obligation de transparence à laquelle elle manque. Rappelons que l’un des buts fixés par le TCA est de « promouvoir la coopération, la transparence et l’action responsable des États  Parties dans le commerce international des armes classiques et bâtir ainsi la  confiance entre ces États ».

Cette transparence permettrait d'instaurer confiance et sécurité entre les États, d'encourager un contrôle démocratique par les assemblées législatives nationales, de garantir la transparence, de veiller à ce qu'un examen parlementaire et public soit réalisé sur l'application et la mise en œuvre du TCA, et d'empêcher le détournement d'armes par des voies illicites ainsi que leur transfert vers le marché noir, des utilisateurs finaux ou des utilisations finales non autorisées.

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