Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

médecine du travail

  • La bombe Macron s’abat sur les droits des salariés ...

    Article du blog de la CGT du Conseil Général 08

    Sous prétexte de favoriser l’emploi, le projet de loi fourre-tout du ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, marque une accélération dans la déréglementation des horaires de travail et la casse des institutions 
que sont les prud’hommes, l’inspection et la médecine du travail.
    La grenade Macron contre le Code du travail est dégoupillée. Le projet de loi censé « libérer l’activité », selon son intitulé, concocté par le ministre de l’Économie comme pour incarner la dictature des intérêts privés sur les choix sociaux et sociétaux a été transmis lundi au Conseil d’État, en vue d’une présentation en Conseil des ministres à la mi-décembre. Si la plupart des thèmes et des mesures du projet étaient connus, certains y ont été inclus dans la plus grande opacité. La mouture finale révèle une attaque de grande ampleur contre les droits des salariés – avec l’extension du travail du dimanche et de nuit –, et contre leurs institutions que sont les conseils de prud’hommes, l’inspection et la médecine du travail. Il révèle aussi la brutalité de la méthode du gouvernement qui, pour certains thèmes, passera par ordonnance pour éviter le débat au Parlement. Décryptage des principaux points du projet.
     

    1. Vannes ouvertes au travail 
du dimanche

     
    Si les socialistes avaient dénoncé en 2009, sous Sarkozy, la loi Mallié élargissant les possibilités d’ouverture des commerces le dimanche, leur projet explose les records en matière d’extension du travail dominical, et ouvre la voie au travail 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 à l’américaine, avec la possibilité de faire travailler les salariés jusqu’à minuit sans que cela soit considéré comme du travail de nuit !
     
    L’extension est multiforme. D’une part, les cinq dimanches par an d’ouverture des magasins qui pouvaient être décidés par les maires des communes passent à douze par an, dont cinq seraient accordés de droit aux commerces, sans que l’édile local puisse s’y opposer. D’autre part, le projet va généraliser l’ouverture des centres commerciaux. La loi Mallié avait légalisé la situation des centres qui ouvraient jusqu’alors dans l’illégalité, en créant le concept de « périmètre d’usage de consommation exceptionnel » (Puce), réservé aux agglomérations de plus d’un million d’habitants. Avec Macron, les Puce sont transformés en « zones commerciales caractérisées par un potentiel commercial », une définition en forme de pléonasme qui signifie que toute zone commerciale, partout en France, pourra obtenir l’autorisation. Autre innovation, en plus des zones touristiques actuelles, le texte crée les fameuses « zones touristiques internationales », qui permettront notamment aux magasins des Champs-Élysées et aux grands magasins comme le Printemps et les Galeries Lafayette à Paris d’ouvrir le dimanche alors que les actions en justice de l’intersyndicale Clic-P les en empêchent aujourd’hui.
     
    Ces zones seront déterminées par les ministères du Travail, du Tourisme et du Commerce, une manière d’exclure les municipalités, comme celle de Paris qui a refusé en 2010 ce cadeau aux grands magasins. Anne Hidalgo, maire PS de la capitale, n’a pas manqué de réagir mardi en prévenant qu’elle n’accepterait pas que « les pouvoirs du maire soient captés par Bercy ». C’est dans ces zones touristiques internationales que les enseignes se voient tailler un Code du travail sur mesure, avec un nouveau concept de « travail de soirée » qui décale à minuit le déclenchement du travail de nuit. Pour faire passer la pilule, le gouvernement instaure pour ces innovations une garantie de volontariat des salariés et le doublement du salaire pour les heures de travail dominical ou vespéral. Les syndicats insistent sur le leurre du volontariat, du fait des pressions possibles des directions sur les salariés. Et pour les majorations de salaire, le texte offre une issue aux patrons. Les entreprises pourront négocier des accords moins favorables, et ce n’est qu’en l’absence d’accord que le filet de sécurité de la loi s’appliquera, avec la majoration de 100 %. De plus, ce filet ne concernera pas les établissements de moins de 20 salariés. L’éclatement de l’activité des groupes en petits établissements distincts leur permettra d’échapper au surcoût du dimanche. Le Clic-P annonce une nouvelle manifestation le 16 décembre.

    2. Prud’hommes : la Justice 
du travail remise au pas

    La spécificité de la justice prud’homale, rendue par des juges issus du monde du travail à parité entre employeurs et employés, c’est du passé. Sous prétexte que les délais de jugement dans les conseils de prud’hommes d’Île-de-France sont inacceptables, Macron engage une restructuration profonde de l’institution, déjà entamée avec la suppression de l’élection des juges prud’homaux, discutée aujourd’hui même à l’Assemblée nationale. Il n’est pas question de donner à ces tribunaux les moyens nécessaires à un bon fonctionnement, mais de les mettre au pas pour qu’ils fassent de l’abattage, au détriment des salariés qui demandent réparation. Dans 92 % des cas, les salariés saisissent les prud’hommes à l’occasion d’un licenciement. Or, dans ce cas, le projet prévoit qu’avec l’accord des parties, l’affaire sera renvoyée vers une formation restreinte (deux juges au lieu de quatre) qui statuera sous trois mois et allouera au salarié une indemnité forfaitaire en fonction d’un barème lié à son ancienneté dans l’entreprise. « On ne sera plus de vrais juges car le travail d’un juge, c’est de regarder chaque cas et de voir les préjudices, pas d’allouer un montant fixe », s’insurge Jamila Mansour, présidente CGT des prud’hommes de Bobigny, où les juges CGT, FO et Solidaires font la grève des audiences depuis lundi, comme à Paris et à Lyon. Autre aspect de la réforme, le juge professionnel prendra le pas sur les juges prud’homaux. Aujourd’hui, les affaires sont jugées par les conseillers prud’homaux et ne font l’objet d’un départage par un magistrat que quand ils ne parviennent pas à trancher. Le projet Macron permet de passer directement à l’étape du juge professionnel. Une manière d’accélérer les procédures et d’instaurer en douce le système d’échevinage (un juge professionnel assisté d’un assesseur employeur et un salarié), fortement rejeté par les organisations syndicales et patronales. « Dans ce système, les juges prud’homaux deviennent optionnels, déplore Jamila Mansour, de la CGT. Le gouvernement veut enterrer les prud’hommes mais de manière perverse car il n’a pas le courage d’y aller frontalement. »

    3. Inspection et médecine 
du travail : carte blanche pour réformer

    Ce sont les deux surprises du chef, l’inclusion dans le projet Macron d’une carte blanche pour réformer la médecine du travail et l’inspection du travail par voie d’ordonnances, histoire de contourner magistralement les débats au Parlement. Concernant l’inspection du travail, le premier volet de la réforme dite Sapin – la restructuration des services – est passé par décret et en cours d’application. Restait le deuxième volet, consistant à donner aux inspecteurs de « nouveaux pouvoirs » de sanction contre les employeurs en infraction, sous forme d’amendes administratives ou de transactions pénales décidées par les directeurs régionaux du travail. Un projet contesté par les syndicats CGT, Solidaires et SNU-FSU, qui y voient une façon d’épargner aux patrons des poursuites pénales déjà trop rares. Le projet ayant été rejeté au printemps par le Parlement, les syndicats guettaient sa réapparition. Alors que le ministère du Travail leur a refusé toute information ces dernières semaines, ils découvrent dans le projet Macron que leurs pouvoirs seront réformés par ordonnance sous neuf mois, sans précision sur le contenu. « C’est l’opacité totale ! » dénonce Anthony Smith, inspecteur du travail CGT. Le texte prévoit aussi la révision « de la nature et du montant des peines applicables en cas d’entrave au fonctionnement des institutions représentatives du personnel », conformément à la promesse formulée mi-octobre par François Hollande de supprimer la peine de prison pour les patrons piétinant les droits des délégués du personnel, des comités d’entreprise, des comités d’hygiène et sécurité, au motif que cela inquiéterait les investisseurs étrangers. En réalité, les employeurs ne vont jamais en prison et les procès-verbaux d’inspecteurs pour entrave sont très souvent classés par la justice. En allégeant encore la peine inscrite dans le Code du travail, le gouvernement lance un signal supplémentaire pour que ces droits ne soient pas respectés. Même opacité pour les médecins du travail qui ont découvert fin octobre qu’ils seront frappés par le « choc de simplification » du gouvernement. Ce dernier compte supprimer la visite médicale périodique des salariés et mettre fin aux avis d’aptitude « avec restrictions » délivrés par les médecins du travail, qui obligent l’employeur à aménager les postes de travail. La réforme est finalement venue se nicher dans la loi Macron, mais là encore sans précision puisque c’est par ordonnance que seront prises ces mesures.

    ob_4fc332_medecine-du-travail.jpg