Communiqué de l’Anafé, dont la LDH est membre
Le rapport « 976 : Au-delà des frontières de la légalité, Rapport de mission à Mayotte/La Réunion » présente les résultats de la mission exploratoire de l’Anafé réalisée en mars 2016. Un état des lieux de la situation à Mayotte met en lumière les dysfonctionnements liés notamment au régime dérogatoire applicable aux personnes étrangères et dénonce les nombreuses violations de leurs droits, notamment celles privées de liberté.
Chaque année, près de 20 000 étrangers sont privés de liberté à Mayotte, presque tous sont renvoyés aux Comores parmi lesquels environ 5 000 mineurs. La question de la privation de liberté revêt donc un enjeu particulier notamment au regard du régime dérogatoire qui s’y applique en matière de droit des étrangers.
La particularité de la situation à Mayotte, en termes économiques, sociaux ou culturels, est régulièrement utilisée pour justifier les différences de traitement avec le reste du territoire français et les violations des droits fondamentaux de la population en général et des étrangers en particulier.
Sous couvert d’un « afflux massif » d’étrangers et d’une « pression migratoire importante », le droit applicable aux étrangers à Mayotte fait l’objet de dérogations au droit commun sans équivalent dans les autres départements : enfermement et renvoi des mineurs isolés étrangers, absence de recours suspensif contre les décisions d’éloignement, refus d’enregistrement de demandes d’asile, traitement accéléré des procédures…
L’Anafé a toujours porté une attention particulière à la situation en outre-mer et a été partie à plusieurs contentieux notamment concernant l’application du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile à Mayotte.
La première mission en outre-mer, en 2016, s’est concentrée sur la situation dans l’Océan indien et notamment à Mayotte et à la Réunion. Elle avait pour but d’appréhender la question de la privation de liberté des étrangers, au regard de la confusion des régimes applicables en centre de rétention et en zone d’attente. L’objectif était aussi d’enquêter sur la situation et les pratiques de l’administration à Mayotte et d’apporter un soutien aux acteurs associatifs et aux professionnels qui œuvrent au quotidien pour l’amélioration de la situation des étrangers privés de liberté faisant l’objet d’une réelle violence institutionnelle.
S’il est vrai que l’on ne peut détacher Mayotte de son contexte, cette différenciation – appelée « exception mahoraise » – est bien trop souvent utilisée aux niveaux local et national pour justifier les exceptions législatives et réglementaires, une pratique attentatoire au principe d’indivisibilité de la République, à ses valeurs et principes fondamentaux, ainsi que les violations des droits fondamentaux.
Les informations recueillies lors de la mission de l’Anafé ont permis de mettre en lumière de graves dysfonctionnements à Mayotte et des violations des droits des étrangers notamment des personnes plus vulnérables (personnes privées de liberté, demandeurs d’asile, personnes malades, femmes enceintes ou mineurs). L’Anafé préconise des modifications des législations et des pratiques aux autorités locales et nationales pour une réponse humaine, solidaire, immédiate et respectueuse des droits humains.
Le 27 mars 2017
Mayotte, un département français en droit, mais pas tout à fait en réalité.