Cette affirmation ne vient pas d'un écologiste attardé, mais du président de l'Autorité de Sureté Nucléaire, M. Pierre-Franck Chevet. D'après le site de l'ASN, il a donc déclaré lors de ses vœux à la presse : « le contexte en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection est préoccupant ».
Il appuie son diagnostic sur des constats, qui tranchent nettement avec le discours officiel des industriels du nucléaire et des responsables politiques favorables à cette filière.
L'ASN se définit ainsi : "L’Agence assure, au nom de l’Etat, la réglementation et le contrôle du nucléaire pour protéger le public, les patients, les travailleurs et l’environnement. Elle informe les citoyens. "
Vous pouvez retrouver sur son site le compte-rendu complet de cette prise de parole, et des dossiers sur les principaux secteurs de la filière nucléaire.
Voici le résumé des 3 constats sur lesquels reposent les craintes du Président de l'ASN :
« La sûreté nucléaire et la radioprotection sont confrontées à des enjeux sans précédent »
« La poursuite du fonctionnement des centrales nucléaires au-delà de 40 ans n’est pas acquise : les conditions de cette poursuite restent encore largement en débat »
« D’ici 2017, l’ASN va recevoir les rapports de réexamen de sûreté d’une cinquantaine d’installations du cycle du combustible ou d’installations de recherche qui sont pour majorité des installations anciennes »
« Le déploiement des mesures post Fukushima doit se poursuivre ».
Des difficultés dans la construction d’installations nucléaires nouvelles »
« Les industriels sont en situation économique et financière difficile».
Dans un contexte de réorganisation, l’ASN sera attentive à ce qu’ils retrouvent des capacités financières adaptées à l’exercice de leurs responsabilités, et à ce qu’ils maintiennent les compétences essentielles et les investissements de sûreté.
« C’est dans ce contexte exigeant que l’ASN a demandé un renforcement significatif de ses moyens »
Une réflexion sur le financement du contrôle est nécessaire afin d’assurer durablement à l’ASN et à l’IRSN des moyens humains et financiers adaptés aux nouveaux enjeux.
P. - F. Chevet a souligné que l’ASN donnera la priorité dans l’immédiat au contrôle des installations en fonctionnement ; les instructions liées aux installations nouvelles étant mises de côté provisoirement en attendant qu’une solution soit trouvée.
Si on lit bien l'argumentaire, on comprend que de très gros défis attendent les responsables de la filière nucléaire, que ce soit pour les centrales anciennes, pour les nouvelles ou pour les installations de stockage type Cigeo à Bure. On a la confirmation que pour y faire face, nous avons des entreprises qui n'ont plus la capacité financière nécessaire à exercer leurs responsabilités. Et on apprend enfin que le "gendarme du nucléaire", l'ASN, n'a pas les effectifs suffisants pour exercer la totalité de sa mission de contrôle.
Pour bien saisir le sens de ce message adressé principalement au gouvernement, on peut reprendre la conclusion de l'article de "Reporterre" consacré à ces vœux :
" Pour le directeur de l’ASN, le niveau de gravité employé dans cet exercice de communication se voulait probablement le gage de conscience de la responsabilité qui incombe aujourd’hui l’ensemble de la filière, lui qui rappelait ainsi au détour d’une phrase que « si un accident type Fukushima survenait, et on ne peut l’exclure, ce serait plusieurs pays européens qui seraient concernés »."