Le 4 juin 1989, Place Tiananmen, à Pékin, la Chine réprime dans le sang le mouvement de protestation en faveur de la démocratie. Après cet évènement tragique et en dépit d'un environnement de plus en plus répressif, les mouvements de contestation se sont poursuivis. Retour sur les grandes manifestations en Chine depuis Tiananmen.
Trente-quatre ans après Tiananmen, le droit de manifester reste sévèrement limité en Chine. Toute discussion ou commémoration de la répression de 1989 est lourdement censurée, les autorités qualifient les manifestations de « perturbation de l’ordre public » et, sous la présidence de Xi Jinping, les restrictions se sont encore renforcées, rendant les manifestations extrêmement rares.
Après Tiananmen, certaines personnes ont pourtant continué de se rassembler pour s'exprimer, malgré le risque d'être arrêtées. Ces mouvements de contestation, les autorités chinoises cherchent à les étouffer, à les invisibiliser.
4 juin 1989 : répression de la place Tiananmen
Le 4 juin 1989 est entré dans l'histoire comme le jour où les autorités chinoises ont impitoyablement réprimé les manifestations pacifiques.
Les troupes chinoises ont abattu des centaines, voire des milliers de personnes qui étaient descendues dans les rues, sur ou autour de la place Tiananmen de Pékin pour réclamer des réformes politiques. Une tache indélébile sur l’histoire de la Chine.
1999 : Manifestation du Falun Gong à Pékin
Plus de 10 000 adeptes du Falun Gong - un mouvement spirituel populaire en Chine dans les années 1990 - ont manifesté silencieusement à Pékin contre le harcèlement exercé par le gouvernement à l'encontre de ses membres.
En réaction aux manifestations, le gouvernement chinois a interdit le groupe et lancé une campagne d'intimidation et de persécution, sous la direction d'une organisation spéciale appelée le Bureau 610. Depuis l'interdiction du mouvement, des dizaines de milliers de pratiquants de Falun Gong ont été détenus arbitrairement et nombre d'entre eux ont été torturés.
2011 : Manifestations pro-démocratie de la "révolution de jasmin”
Les manifestations du "printemps arabe" au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, ont trouvé écho en Chine : des appels à manifester ont été relayés en ligne. Les médias affiliés à l'État ont qualifié les rassemblements et les manifestations de "perturbation de l'ordre public".
Plus d'une centaine de militants, souvent actifs sur Twitter et sur des blogs, ont été arrêtés, placés sous surveillance ou assignés à résidence de manière illégale. Certains sont toujours portés disparus.
2012-2015 : Mouvement féministe
En 2012, un nouveau mouvement féministe est apparu, connu pour ses actions de rue et ses manifestations pour les droits des femmes.
Depuis, le gouvernement chinois a enclenché une répression systématique du mouvement féministe. Les méthodes utilisées comprennent des campagnes de dénigrement et le harcèlement des miilitantes, la fermeture des groupes sur le genre dans les universités et la censure des discussions en ligne sur les questions liées au genre et aux droits des femmes. En 2015, cinq personnes, membres de ce mouvement, ont été arrêtées et détenues.
Aujourd'hui, les militantes féministes chinoises poursuivent leur travail en s'organisant hors ligne et en militant à l'étranger.
2012-2020 : Mouvement des nouveaux citoyens
Le Mouvement des nouveaux citoyens est un réseau informel d'activistes chinois fondé par le juriste Xu Zhiyong en 2012 pour dénoncer la corruption.
Des dizaines d'avocats et de militants associés au réseau ont été pris pour cible après avoir participé à une réunion informelle organisée à Xiamen, une ville de la côte sud-est de la Chine, en décembre 2019. Le groupe, dont faisait partie Xu Zhiyong, s'était réuni pour discuter de la situation de la société civile et des affaires courantes en Chine.
Plus tard dans le mois, la police a convoqué ou placé en détention les participants à la réunion de Xiamen. Xu et l'avocat des droits humains Ding Jiaxi ont été condamnés respectivement à 14 et 12 ans de prison en avril 2023.
2022 : Manifestations contre la politique zéro covid
En novembre 2022, des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux ont montré des manifestations dans des universités et des villes de Chine, notamment à Pékin, Guangdong, Shanghai et Wuhan. Les manifestants pacifiques ont commémoré les victimes de l'incendie d'Urumqi et ont appelé à l'assouplissement des mesures de confinement. Beaucoup ont également demandé la fin de la censure et certains ont appelé à la démission du président Xi Jinping.
L'ampleur de ces manifestations était inédite et inattendue, étant donné le niveau de répression des manifestations en Chine. Or, le mouvement de novembre 2022 a montré le courage des manifestantes et manifestants chinois. Des milliers de personnes ont brandi des feuilles de papier blanc, scandé des slogans et imaginé toutes sortes d’action de protestation créatives.
4 juin 2023 : interdiction des commémorations de Tiananmen
La commémoration publique, ou la simple mention de la répression de Tiananmen est toujours interdite en Chine. À Hong Kong, la veillée annuelle en hommage aux victimes de la répression avait lieu chaque année depuis 1989. Des centaines de milliers d'habitants y participaient. Mais depuis 2020, elle est interdite, en raison de l'intensification de la répression après la promulgation de la loi sur la sécurité nationale imposée par Pékin. Certains des organisateurs de la veillée, comme l'avocate des droits humains Chow Hang-tung, sont encore détenus.
Malgré les méthodes de répression, les habitants de Hong Kong, de la Chine continentale et du monde entier continuent de lutter pour le droit de manifester en Chine.
Un citoyen de Beijing se tient devant des tanks sur l'avenue de la paix éternelle dans cette photo d'archives du 5 juin 1989 lors de la répression du soulèvement de la place Tiananmen / © REUTERS - Arthur Tsang JIR - LCY