Communiqué d'Amnesty International le 12.05.2022
Ces 25 dernières années, plus de 50 pays ont modifié leur législation pour faciliter l’accès à l’avortement, en reconnaissant parfois son rôle essentiel pour la protection de la vie, de la santé et des droits fondamentaux des femmes, des filles et des personnes trans. Pour autant, dans de nombreuses régions du monde, ce droit est encore fragilisé voire interdit.
Le 21 février 2022, la Colombie a dépénalisé l’avortement jusqu’à 24 semaines de grossesse. Une décision historique rendue possible par la mobilisation de milliers de femmes dans le pays.
En 2020, l'Argentine et l ’Irlande ont réalisé des avancées historiques dans le domaine de la protection des droits sexuels et reproductifs des femmes en dépénalisant l’avortement. Au Mexique, la Cour suprême a rendu le 7 septembre 2021 un arrêt progressiste encourageant.
Ces décisions ont été rendues possibles grâce à des années de lutte auxquelles nous avons participé. Mais, cette lutte continue car de nombreux pays comme les États-Unis font marche arrière mettant en danger la vie de millions de femmes. Au Texas, la loi de septembre 2021 interdit d’avorter dès six semaines de grossesse : à cette date, la plupart des personnes concernées ne savent pas encore qu’elles sont enceintes. Cette loi va même plus loin avec une disposition sans précédent en criminalisant toute personne qui aiderait une autre à avorter. Cela signifie que les centres de santé et leur personnel risquent d’être poursuivis en justice, tout comme les membres de la famille ou les amis.
Même en Europe ce droit reste menacé : des pays comme Malte ou Andorre criminalisent toujours l’avortement. En Pologne, il est maintenant interdit d’avorter sauf en cas de viol. Les nombreuses manifestantes qui se sont opposées à ces législations liberticides ont été violemment réprimées par la police.
Des avortements sont toujours pratiqués quoi qu’en dise la loi
Mettre fin à une grossesse est une décision courante que prennent des millions de personnes. Chaque année, un quart des grossesses se termine par un avortement. Que l’avortement soit légal ou non, les services d’avortement sont toujours nécessaires et des personnes y accèdent régulièrement. D’après l’Institut Guttmacher, le nombre d’avortement est significativement le même dans les pays qui l’interdisent ou le restreignent et dans ceux qui l’autorisent : 37 personnes sur 1 000 y ont recours dans le premier cas contre 34 sur 1000 dans le second.
Lorsqu’ils sont pratiqués par un professionnel de santé dans de bonnes conditions d’hygiène, les avortements sont les actes médicaux les plus sûrs disponibles. Mais quand les gouvernements restreignent l’accès aux avortements, les personnes sont contraintes de recourir à des avortements clandestins et dangereux, en particulier celles qui n’ont pas les moyens de se rendre à l’étranger ou de se faire soigner dans un établissement privé.
L'avortement : 3ème cause de mortalité maternelle
Ce n’est pas parce que l’on empêche des femmes et des jeunes filles d’avorter qu’elles n’ont plus besoin de cette intervention. C’est la raison pour laquelle les tentatives d’interdiction ou de restriction des avortements ne font pas baisser leur nombre. Elles ne font que contraindre des personnes à avorter dans des conditions dangereuses. L’OMS estime que 22 millions d’avortements dangereux sont pratiqués chaque année, pour la grande majorité d’entre eux dans des pays en développement.
Contrairement à un avortement légal réalisé par un professionnel de santé qualifié, les avortements dangereux peuvent avoir des conséquences mortelles, à tel point qu’ils sont la troisième cause de mortalité maternelle à travers le monde et qu’ils entraînent cinq millions de handicaps facilement évitables, d’après l’OMS.
Le droit à l'avortement est menacé aux États-Unis. Le 1er décembre 2021, Amnesty International s'est jointe à des militants devant la Cour suprême des États-Unis pour protester contre la décision à venir qui pourrait entraîner une interdiction totale de l'avortement dans de nombreux États américains. Crédit : Amnesty International.