Depuis plus d’un an, Greenpeace France soutient la mobilisation des étudiant·es et ancien·nes étudiant·es de Polytechnique contre le projet d’implantation d’un centre de Total au cœur du campus de l’école.
Renforcer sa présence dans les écoles, de la primaire à l’enseignement supérieur, est un axe tactique majeur de la stratégie d’influence de la multinationale Total. Constatant que le pétrole séduit de moins en moins les nouvelles générations d’étudiant·es, il devient de plus en plus crucial pour la firme de s’infiltrer au sein des campus des grandes écoles — son terrain de jeu privilégié — pour entretenir un vivier d’étudiant·es brillant·es, les biberonner et les séduire en les persuadant que son modèle économique basé sur les énergies fossiles est le bon.
Le projet de Total d’installer un bâtiment abritant sa direction recherche et développement au cœur du campus de la prestigieuse École polytechnique, prévoyant d’accueillir 250 de ses salarié·es, est une illustration parfaite de cette stratégie d’influence. Si cette stratégie n’est pas, en elle-même, pénalement répréhensible, la présence de Patrick Pouyanné (PDG de Total et ancien polytechnicien) au sein du Conseil d’administration de Polytechnique, soulève des questions de conflit d’intérêts. Ses prises de paroles au sein du Conseil d’administration au nom de l’entreprise et sur un projet auquel il était intéressé seraient susceptibles de constituer une infraction pénale.
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La validation du projet malgré la contestation d’étudiant·es et de professeur·es
Bien que l’origine du projet remonte à 2018, ce n’est que fin 2019 que la grande majorité des étudiant·es a pris connaissance de l’existence du projet. Une première tribune des élèves dénonce le projet, et un vote est organisé dans la foulée par les élus étudiants : 61% des élèves se prononcent contre l’emplacement du bâtiment, jugé beaucoup trop proche des lieux d’habitation et de vie. Le comité de mobilisation Polytechnique n’est pas à vendre est créé, et s’ensuivent plusieurs mois de mobilisation, avec des prises de position des élèves et des anciens élèves. En mars 2020, Greenpeace apporte son soutien en organisant une action conjointement avec les Amis de la Terre et Action Climat Paris. Suite à cette vague de mobilisation, les administrateurs de Polytechnique reconnaissent qu’il faut étudier un possible déplacement du bâtiment.
La question cruciale de l’emplacement du bâtiment de Total revient donc à l’ordre du jour du Conseil d’administration en avril 2020. Plusieurs emplacements possibles sont proposés aux administrateurs. Lors des discussions, Patrick Pouyanné indique clairement quel est l’emplacement favorisé par le groupe.
Quelques jours plus tard, le sénat des professeurs de l’X ainsi que le conseil académique font part de leurs réserves sur la conduite du projet et insistent sur la transparence du processus de décision. En juin 2020, la Sphinx fait parvenir une note juridique au Conseil d’administration dans laquelle elle alerte des risques juridiques entourant le processus.
Finalement, l’emplacement définitif choisi le 25 juin 2020 ne se situe qu’à 250 mètres de l’emplacement initial, toujours au cœur des lieux de vie et d’enseignement des étudiant·es. Il correspond, par ailleurs, au choix favorisé par le PDG de TOTAL.
Total vient d’obtenir un permis de construire et les travaux devraient commencer en juillet.
Et après ?
Il appartiendra au Parquet de décider des suites qu’il entend apporter à cette affaire.
Selon ces suites, il reviendra à la direction et au Conseil d’administration de l’Ecole polytechnique de prendre leurs responsabilités. En parallèle, la Sphinx (association d’étudiant·es et anciens étudiant·es de Polytechnique) a initié un contentieux devant le tribunal administratif pour obtenir l’annulation de la délibération du Conseil d’administration du 25 juin 2020, celui qui donnait la validation finale au projet de Total. Affaire à suivre.