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Arrestation et extradition d’Aurore Martin

Lettre ouverte commune LDH/FIDH adressée à François Hollande, président de la République, au sujet d’Aurore Martin.


             

 

 

M. François Hollande
Président de la République
Palais de l’Elysée
55 rue du Faubourg Saint-Honoré
75008 Paris


Paris, le 6 novembre 2012

 

Monsieur le Président,


La remise aux autorités espagnoles d’Aurore Martin et son incarcération sont sans doute formellement légales. Elles n’en demeurent pas moins, à la fois, une démonstration d’espèce de « la force injuste de la loi », comme un de vos prédécesseurs avait su le dire à d’autres occasions, et une faute politique.
Admettre qu’une ressortissante française puisse faire l’objet de poursuites pénales pour des faits légaux en France, mais réprimés en Espagne, atteste d’une incohérence de l’Etat de droit européen qui porte préjudice à l’idée même de justice.


Cette seule considération aurait dû suffire à empêcher l’exécution d’un mandat d’arrêt qui ne repose que sur l’expression d’idées politiques et sur aucun faits délictueux, et encore moins criminels.
Ceci nous amène à rappeler que, lors de son adoption dans la précipitation à la suite des attentats du 11 septembre 2001, nous avions souligné les dangers d’une telle mesure sans harmonisation des incriminations pénales en vigueur dans les pays de l’Union européenne, et sans garanties des droits de la défense (devenus, en ce domaine, de pure forme). Malheureusement, le souci d’apaiser les peurs engendrées par ces attentats, ainsi que la propension naturelle des gouvernements à s’arroger de plus en plus de pouvoirs, ont fait que nous n’avons pas été écoutés.

Ce n’est pas sans raisons que la Commission européenne, elle-même, s’interroge sur les dysfonctionnements d’un système aussi peu respectueux des libertés individuelles, au point d’envisager des modifications de la directive. Nous vous demandons d’appuyer cette démarche et, au besoin, d’en prendre l’initiative.
Mais, au-delà de ces éléments juridiques, il reste et il demeure qu’une jeune femme est aujourd’hui en détention pour une durée au moins de plusieurs mois, devant une juridiction d’exception parce que les autorités espagnoles ont cru devoir criminaliser une expression politique, celle de l’indépendantisme basque.
Est-il besoin de rappeler que nous avions fermement condamné le recours à la violence de l’ETA, passée la dictature franquiste ?

Aujourd’hui, la situation n’est plus la même et nous ne comprenons pas qu’Aurore Martin se voit reprocher des activités purement politiques qui ont amené son courant politique à être le deuxième parti politique du pays basque espagnol lors des dernières élections.


Il y a quelque chose d’incompréhensible à constater que les autorités françaises et espagnoles continuent à penser que c’est en ayant recours à la répression que se réglera ainsi un problème politique multiséculaire.
La multiplication des protestations de toutes origines qui se manifestent atteste qu’il est temps de donner à cette question une solution autre que judiciaire ou policière.
Nous vous demandons, Monsieur le Président, d’intervenir auprès du gouvernement espagnol afin que s’ouvre un véritable dialogue politique qui inclut tous les acteurs, y compris du côté français.
Nous vous demandons d’user de votre influence afin qu’Aurore Martin ne soit pas la victime d’un conflit qui est en train de trouver une issue dans le cadre démocratique.


Vous comprendrez que nous rendions cette lettre publique.


Recevez, Monsieur le Président, l’expression de notre haute considération.

Pierre Tartakowsky
Président de la Ligue des droits de l’Homme

Souhayr Belhassen
Présidente de la Fédération internationale
des Ligues des droits de l’Homme

Commentaires

  • Lire sur Médiapart que l'arrestation et l'extradition ont été faites avec l'accord du Président de la République Française et des ministres concernés.
    Donc Valls et Taubira ont menti !

Les commentaires sont fermés.