Selon le député Eric Raoult, le ministre de la Culture devrait rappeler la romancière Marie Ndiaye à son « devoir de réserve » parce qu’elle aurait tenu des propos « peu respectueux […] à l’égard du chef de l’Etat », alors qu’ayant reçu le prix Goncourt elle « défend les couleurs littéraires de la France ».
Si la Ligue des droits de l’Homme vient de lancer une campagne intitulée « Urgence pour les libertés, urgence pour les droits », c’est qu’elle se rappelle le temps où les amis de monsieur Raoult qualifiaient l’ORTF de « voix de la France » pour soumettre à la censure du ministre de l’Information les journalistes qui y travaillaient. Il fait encore mieux aujourd’hui : ce sont maintenant les écrivains qui doivent marcher au pas et témoigner leur « respect » au « chef de l’Etat ».
Avant que le New York Times ne soit tenté par un nouveau parallèle entre la France et le Gabon, rappelons à ce député amateur de marche au pas la réaction du général De Gaulle aux démangeaisons répressives d’un ministre de l’Intérieur : « On ne poursuit pas Jean-Paul Sartre ». C’était l’époque, il est vrai, où les poursuites pour « outrage au président de la République » étaient bien moins nombreuses qu’aujourd’hui : en République, le respect ne se commande pas, il se mérite.
Si Marie Ndiaye doit demander au ministre de la Culture ce qu’elle peut dire sans manquer de respect à Nicolas Sarkozy, quelle sera la prochaine provocation destinée à réveiller le ralliement de l’extrême droite à la majorité présidentielle ? Qu’un député prenne une romancière pour un fonctionnaire, est-ce une énormité qui n’engage que son auteur ou bien le énième message d’une campagne orchestrée depuis des semaines, de dérapage sur les « Auvergnats » en appel à la délation, « devoir républicain » [sic] ? Décidément, la quête d’« identité nationale » officielle est sans limites.
Paris, le 12 novembre 2009
Commentaires
La situation est bien plus inquiétante qu'il n'y paraît. Pour faire oublier les affaires (EPAD, attentat de Karachi, sondages de l'Elysée, mensonge sur le mur de Berlin, intervention de l'Etat pour des attributions de subventions à l'ainé des fils Satkozy, ... la liste est sans fin), mais également pour préparer les élections régionales de mars prochain, l'UMP met un grand coup de barre à l'extrême droite. Le discours de cet après-midi dans la Drôme avec le "on ne peut pas profiter de la sécurité sociale sans se demander ce que l'on peut faire pour son Pays" est terrifiant de racisme et de démagogie, car il sous entend clairement que les étrangers profitent de la France et vivent des allocations. Cela fait frémir, mais tant qu'il y aura un auditoire ! Je consultais récemment les résultats des élections régionales de 2004. Le Front National en Champagne-Ardenne était proche des 20% et son maintien au 2ème tour avait fait perdre la Droite. N'oublions pas que c'était il y a à peine 6 ans et que ces électeurs là voteront encore en mars 2010. Nicolas Sarkozy lui le sait ...
Eric Raoult a récidivé!
Quelques jours avant ses propos concernant Marie Ndiaye, Eric Raoult , président du groupe d'amitié France-Tunisie s'est livré le samedi 31 octobre à une attaque étonnante contre une journaliste du Monde, Florence Beaugé.Cette journaliste a été refoulée arbitrairement , expulsée des son arrivée à l'aéroport de Tunis.Et Eric Raoult a déclaré qu'il ne fallait pas s'étonner d'un tel fait "quand on fait de la provocation à l'égard du président Ben Ali"Inventant de toutes pièces des raisons pour tenter de justifier la décision du Président Ben Ali, Eric Raoult a prêté à Florence Beaugé des propos qu'elle n'a jamais tenus. Il n'est donc pas étonnant que ce parlementaire veuille imposer un devoir de réserve tous azimuts!Si seulement il existait un devoir d'intelligence qu'on puisse imposer à Eric Raoult!