Un décret qui met en danger le patrimoine (23/09/2016)

Un décret d'application peut modifier profondément la direction donnée par une loi. Ainsi le décret de mai 2016 inverse la charge de la preuve, concernant l'opportunité d'une isolation par l'extérieur des bâtiments anciens. Cette obligation prévue par la loi sur la transition énergétique excluait les constructions possédant des spécificités architecturales et patrimoniales de leur  bâti. Le décret d'application demande au propriétaire de faire la preuve de l’inopportunité esthétique et patrimoniale d’une telle isolation, en chargeant un architecte de dresser un argumentaire. Le propriétaire se voit donc dans l'obligation de mettre en œuvre une démarche coûteuse et au résultat aléatoire : rien de mieux pour décourager toute tentative de recours.

Les associations de défense du patrimoine sont mobilisées contre ce décret, voici la réaction de l'ASPV

Depuis octobre 2014, les associations et fédérations nationales de sauvegarde du patrimoine se mobilisent contre l’obligation de travaux extérieurs d’isolation prévus en cas de restauration de bâtiment par la loi sur la Transition énergétique.
Votée le 17 août 2015, la loi rendait obligatoire l'Isolation Thermique par l'Extérieur (ITE) en cas de ravalement de façade des bâtiments, exceptés ceux présentant des spécificités énergétiques et architecturales. Les associations nationales de protection du patrimoine dont Patrimoine-Environnement à laquelle adhère notre association, regroupées dans le G8 Patrimoine, avaient obtenu qu'un décret précise les catégories de bâtiments concernés et ceux exemptés (en fonction de la date de leur construction ou des matériaux mis en œuvre).
Or le décret du 30 mai 2016 avec application au 1er janvier 2017 généralise l'ITE à tous les bâtiments !
Ce décret, relatif aux "travaux embarqués" (c’est-à-dire rendus obligatoires à l’occasion d’autres travaux) confirme les craintes des associations. Ce texte complexe - malgré les protestations émises lors de la consultation du public - est à la fois irrespectueux de la loi qu’il entend appliquer, coûteux pour les propriétaires, inutile et désastreux pour la qualité architecturale.

 

Et voici la réaction  de Vieilles maisons françaises

La loi relative à la Transition Energétique du 17 août 2015 prévoit que les travaux de rénovation du bâti répondent à une obligation de performance énergétique. Cette obligation se traduit par une incitation à l’isolation par l’extérieur. Toutefois, cette rénovation ne peut se faire contre les spécificités architecturales et patrimoniales du bâti. Elle renvoie donc, via un décret d’application du 30 mai 2016, à la liste des catégories de bâtiments soumis à cette règlementation. Or les Associations Nationales du Patrimoine (membres du G8 Patrimoine) s’opposent à la rédaction de ce décret d’application.

Que prévoit le décret d’application du 30 mai 2016 ?
Relatif aux « travaux embarqués », il confirme les craintes des associations. Il ne correspond pas au texte proposé lors des réunions de concertation de janvier 2016 entre le ministère de l’Ecologie et les acteurs du patrimoine.
A la place de cette liste et contrairement au texte de loi, ce décret créé une obligation générale d’isolation pour tous travaux de ravalement importants. Pour s’exonérer de cette obligation, le propriétaire doit charger un architecte de dresser un argumentaire afin de prouver l’inopportunité esthétique et patrimoniale d’une telle isolation. Ce renversement opéré par le décret met en danger le patrimoine de proximité qui donne à chaque région sa typicité architecturale. La technique de l’isolation par l’extérieur, qui convient parfaitement au bâti récent, n’est pas adaptée au bâti ancien, puisqu’elle empêche les matériaux utilisés de respirer (pierre, mortier etc.) et conduit à une uniformisation et à une dénaturation des façades.

La proposition des associations du Patrimoine
Dans le cadre du débat public mis en place par le ministère de l’Ecologie, les associations du Patrimoine avaient proposé que le bâti d’avant 1948 soit exclu de ces obligations, d’une part à cause des considérations patrimoniales mais aussi à cause des propriétés isolantes de ces matériaux, qui ne sont pas à remettre en cause.
Des études menées par les services de l’État et Maisons Paysannes de France montrent que ces bâtiments ont une bonne performance énergétique et se classent en D ou en C. Ces performances peuvent être améliorées par différents travaux, isolation sous toiture, entretien des huisseries, etc…

Devant ces menaces inédites pour notre cadre de vie, et dans l’attente d’évolutions, les associations nationales de protection du patrimoine reconnues d’utilité publique ont intenté un recours gracieux le 27 juillet 2016 auprès du premier ministre, lui demandant de retirer son décret.
Sans réponse avant le 27 septembre 2016, elles sont déterminées à saisir le Conseil d’État.

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Façade à Landèves

21:28 | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : patrimoine, bâtiment historique, isolation | |  Facebook | |  Imprimer |