Décret sanctions RSA : les pauvres toujours coupables (10/06/2025)
Communiqué d'ATD quart monde du 05.06.2025
Le décret du 31 mai 2025 qui instaure un nouveau régime de sanctions pour les allocataires du RSA marque un tournant majeur dans la politique sociale de l’État : désormais, la pauvreté n’est plus un fléau à combattre, mais une faute à punir. Issu de la loi « pour le plein emploi » du 18 décembre 2024, ce texte ne protège pas, n’accompagne pas, mais punit les plus pauvres.
Des sanctions disproportionnées
Le nouveau barème de sanctions met en péril le droit à des moyens convenables d’existence et pourra désormais être suspendu même en l’absence de tout autre revenu. Comme l’illustre l’exemple de Caroline : privée d’allocations chômage pour un retard de démarche administrative, elle devrait basculer vers le RSA. Mais avec les nouvelles règles, elle se retrouve sans aucun revenu pendant quatre mois, le temps que l’administration autorise une nouvelle demande auprès de France Travail.
Face à la sanction les personnes disposent de 10 jours pour faire valoir leurs observations, un délai irréaliste pour des allocataires confrontés à des difficultés administratives, sociales ou de santé. Ces décisions peuvent entraîner des suspensions d’au moins 30 % du RSA dès le premier mois, jusqu’à la suppression totale de l’allocation, plongeant ainsi des milliers de foyers dans une situation d’extrême pauvreté. Quand on est au RSA, on ne vit pas, on survit ; et désormais, même cette survie est menacée.
Une réforme qui éloigne de l’emploi digne
Ce décret ne rapproche pas les personnes de l’emploi, elle les éloigne de leurs droits. Les premiers punis sont les personnes les plus éloignées de l’emploi car leurs situations complexes ne seront pas prises en compte par les conseillers par manque de temps, de réponses adaptées et de résultats mesurables. En réalité, la grande majorité des personnes au RSA font face à des difficultés qui nécessitent un accompagnement dans la confiance, et sur le long terme.
L’accompagnement personnalisé est un leurre : les parcours sont automatisés par des algorithmes, et les conseillers sont débordés et pas assez nombreux. Les professionnels eux-mêmes alertent : cette réforme va alourdir leur charge de travail et les éloigner de leur mission première, l’accompagnement humain, au profit d’un suivi bureaucratique centré sur des indicateurs de “recherche active d’emploi”.
Le décret est l’application d’une idée fausse sur les pauvres et la pauvreté : les allocataires du RSA seraient des « fainéants » qu’il faudrait mobiliser pour trouver un emploi. Quel dommage qu’aucune concertation sérieuse n’ait eu lieu avec les associations de terrain et les personnes concernées, pour enfin déployer une réforme adaptée aux besoins réels des personnes. Alors qu’une pétition réunit 10 775 signatures et des milliers de témoignages d’allocataires et de professionnels de toutes les institutions concernées par la réforme (missions locales, CAF, France Travail, etc.)[1].
ATD Quart Monde appelle à faire le choix de l’égale dignité
La lutte contre la pauvreté se gagne par la confiance, le respect et un accompagnement adapté. Des alternatives existent, comme Territoires zéro chômeur de longue durée qui fait ses preuves sans passer par la sanction.
ATD Quart Monde demande :
- D’assurer des moyens convenables d’existence à tous les citoyens ;
- De suspendre l’application de la réforme du RSA ;
- De mettre en place un accompagnement dans la confiance et la durée, adapté aux personnes qui vivent la pauvreté ;
- De déployer une véritable politique de lutte contre la pauvreté avec les acteurs concernés.
22:00 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : rsa, décrets sanction, atd | |
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