La déraison d'Etat, ça suffit ! (23/05/2024)
Communiqué de FNE le 23.05.2024
La dernière estimation du nombre de loups présents en France est connue depuis des semaines par les responsables gouvernementaux, qui se sont gardés de la rendre publique, et pour cause : elle fait état d’une baisse de la population de 9 %, passant de 1096 loups estimés pour l’année 2022 à 1003 individus pour 2023.
Cette information que nous révélons aujourd’hui est particulièrement préoccupante, alors que le gouvernement a reconduit automatiquement le plafond annuel de loups dont la destruction est autorisée (209 individus), et qu’il plaide toujours pour un déclassement du statut de protection du loup au niveau européen.
Les scientifiques du Muséum d’histoire naturelle ont produit en 2019 une note en réponse à une saisine ministérielle, dans laquelle il était souligné que le niveau élevé de destructions autorisées par l’Etat risquait concrètement d’entraîner une baisse de la population, mais le gouvernement n’en a tenu aucun compte. Il n’existe par ailleurs aucune étude scientifique récente sur la viabilité de la population de loups française, qui devrait pourtant être à la base d’une position de demande de déclassement.
Aujourd’hui, avec cette estimation qui concrétise ces alertes scientifiques, il est de la responsabilité du gouvernement de baisser immédiatement le plafond de destructions autorisables pour 2024 en tenant compte de cette nouvelle estimation et en modifiant la « note technique » de la préfète coordonnatrice, et de cesser de prôner un déclassement du niveau de protection de l’espèce, cette nouvelle estimation venant renforcer le constat qu’elle n’est pas en bon état de conservation.
Il y a 5 ans, l’Etat avait justifié l’augmentation du plafond annuel en affirmant : « la croissance de la population de loups intervient dans un contexte marqué par un niveau de dommages aux troupeaux qui se maintiennent à un niveau élevé […] et qu’il apparait aujourd’hui nécessaire de temporiser la croissance de l’espèce afin de laisser le temps aux éleveurs de s’adapter à la présence du loup ». Aujourd’hui, alors que le niveau des dommages est stabilisé depuis 2017 et qu’il a même baissé significativement en 2023 de 9 % selon les constats officiels de l’Etat, cet argument ne tient plus et les choix du gouvernement pour ce qui concerne les autorisations
de destruction s’apparentent plus à une volonté d’empêcher l’installation de l’espèce sur de nouveaux territoires qu’à une recherche de prévention des dommages aux troupeaux. Concrètement, sur la période 2018-2021, le taux de survie des loups était de seulement 27 % dans les territoires où l’espèce arrive sans être installée durablement, contre 68 % dans les territoires où elle est installée de plus longue date.
Cette orientation du gouvernement se traduit dans la multiplication des autorisations de tirs de loups hors des conditions dérogatoires prévues par la loi (troupeaux non ou mal protégés, dégâts localement faibles sur des tirs autorisés, nombre de loups détruits sans proportion avec les dommages constatés puisque les arrêtés d’autorisation ne comportent pas de précisions sur le nombre d’individus dont la destruction est autorisée, …).
Les organisations de protection de la nature qui ont suspendu depuis septembre 2023 leur participation au Groupe National Loup, voient malheureusement confirmer leur analyse que le gouvernement se moque de cette instance de « dialogue » et gère le dossier de façon politicienne : opacité dans la transmission des données, définition d’objectifs pour le Plan National Loup ne reposant pas sur des données scientifiques, facilitation réglementaire des tirs alors même que les dommages sont déjà en baisse.
Nos organisations demandent à l’Etat de changer sans délai les orientations de gestion de la présence du loup dans notre pays et de fonder ses choix, ainsi qu’il le prône lui-même régulièrement, sur des données et analyses scientifiques et le respect du droit, c’est à dire la poursuite de l’objectif d’atteinte du bon état de conservation pour la population de loups dans notre pays.
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