Disparitions, internement, opacité : les crimes subis par les minorités musulmanes dans le Xinjiang (30/08/2021)
Publié le 27.08.2021 par Amnesty International.
Nous avons enquêté sur les crimes contre l’humanité qui pourraient avoir été commis dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang, en Chine. Parmi ces potentiels crimes figurent les disparitions forcées de personnes.
Il existe de nombreux cas de disparitions forcées présumées au Xinjiang. En 2021, nos chercheurs se sont entretenus avec plus de 50 personnes originaires du Xinjiang installées à l’étranger dont des membres de la famille avaient disparu et se trouvaient probablement en détention. Des journalistes nous ont également confirmé avoir reçu ce même type de témoignages.
D’après nos recherches, dans la majorité des cas, leurs familles avaient connaissance de leur placement en détention et elles pouvaient communiquer avec eux. Ces communications sont cependant souvent restées sporadiques et ont systématiquement fait l’objet d’une surveillance. Dans deux cas, néanmoins, les anciens détenus avaient été emprisonnés pendant des mois ou des années sans que leurs familles n’aient semble-t-il été informées de leur situation.
"La police faisait sortir les gens de chez eux avec les poignets menottés dans le dos, même les femmes. C’était impossible de résister. Imaginez que, soudainement, un groupe de policiers entre chez vous, vous menotte et vous mette une cagoule noire sur la tête […]. C’était très triste. Cette nuit-là, nous avons procédé à 60 arrestations. Chaque jour, ils arrêtaient d’autres personnes"
Aiman
Représentant de l’État chinois qui a participé à des arrestations collectives dans la région du Xinjiang, en Chine
L’opacité autour des camps de détention
Le sort réservé à de nombreuses personnes envoyées dans des camps est incertain. Les autorités chinoises mettent tout en œuvre pour dissimuler ce qui se passe dans ces camps, à l’abri des regards. En raison du secret qui entoure la détention en camp d’internement au Xinjiang et de l’absence fréquente de documents officiels, il s’avère presque impossible de localiser une personne en particulier ou d’obtenir une confirmation sur son sort depuis l’étranger. Les personnes originaires du Xinjiang qui se trouvent désormais à l’étranger n’ont aucun moyen de localiser les membres de leur famille dont ils sont sans nouvelle. Elles ne reçoivent jamais de confirmation officielle de la part des autorités chinoises.
Les ambassades chinoises aussi gardent le secret
Les familles résidant à l’étranger qui cherchent des informations sur leurs proches disparus peinent à en avoir. Des représentants de consulats chinois à l’étranger leur répondent de retourner en Chine pour les obtenir.
Cela est notamment dû au fait que les personnes qui résident dans le Xinjiang ont interdiction de communiquer avec leurs familles et amis à l’étranger, en particulier au sujet de tout ce qui concerne le système de détention massive. Le simple fait de communiquer avec quelqu’un à l’étranger constitue un motif pour l’envoyer en camp d’internement.
Au regard des restrictions d’accès au Xinjiang et des difficultés rencontrées pour recueillir des informations relatives aux violations commises dans la région, nous estimons qu’il est également nécessaire de donner la priorité à de nouvelles enquêtes internationales indépendantes sur ces allégations.
L’interdiction des disparitions forcées est une norme impérative du droit international.
Aux termes de la Convention internationale sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forces, on entend par disparition forcée « l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la loi » (article 2).
La pratique généralisée ou systématique de la disparition forcée contre la population civile constitue un crime contre l'humanité (article 5).
Bien que la Chine ne soit pas partie à la Convention contre les disparitions forcées, elle est tenue de respecter l’interdiction de commettre des disparitions forcées en vertu du droit international coutumier et d’autres traités relatifs aux droits humains.
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