Sècheresse : les barrages, fausse solution face au dérèglement climatique (18/08/2019)
Dossier de FNE (extraits)
Projet aberrant de Sivens, barrages illégaux de Caussade et de Fourogue et tant d’autres, notamment en Adour Garonne. Les conflits autour de la construction de barrages d'irrigation se multiplient ; ils opposent régulièrement certains irrigants et des citoyens soucieux de la biodiversité, du climat et du juste partage de l'eau. Investi de longue date sur ces dossiers, à l’image des combats historiques contre la multiplication des barrages sur la Loire ou à Charlas, le mouvement France Nature Environnement milite régulièrement contre la construction de nouveaux barrages. Ils aggravent les sècheresses qu'ils sont censés combattre. Explications.
En France, l'agriculture, c'est 48 % de la consommation d'eau, avec un pic sur les 3 mois d'été où elle représente jusqu’à 80 % de l’eau consommée sur le territoire1. Cette grande soif est particulièrement liée à l'irrigation, utilisée sur moins de 6 % des surfaces de production agricole. Or, la crise climatique entraine des sècheresses de plus en plus longues, fréquentes et intenses et la France n'est pas épargnée par le phénomène. Dans ce contexte, certains syndicats agricoles d'irrigants réclament régulièrement de nouveaux barrages. L'idée est de stocker davantage d'eau l'hiver pour l'utiliser l'été. Seulement, cette option simpliste se révèle particulièrement inadaptée pour l'agriculture, le territoire, ses citoyens et délétère pour l'ensemble du cycle de l'eau. Pire, elle aggrave les effets du dérèglement climatique qu'elle est censée pallier.
Faire un barrage, c'est aggraver les sécheresses en aval
Faire un barrage en plein milieu d'un cours d'eau entraîne inévitablement une baisse de la quantité d’eau pour l'aval. La faune et la flore en subissent les effets désastreux mais ce sont également les hommes et femmes vivant en aval qui voient leur cours d'eau s'étioler alors que ce bien commun est utilisé pour de nombreux usages. Quand les épisodes de sècheresses arrivent, des cours d’eau sont mis artificiellement à sec. C'est bien souvent le cas dans le Sud-Ouest et particulièrement sur le bassin d'Adour-Garonne où France Nature Environnement Midi-pyrénées, pour préserver la vie biologique des cours d’eau, a obtenu plusieurs condamnations1 de gestionnaire de barrages ne respectant pas les débits minimum d'eau.
Sur ce phénomène d'assèchement, une analyse2 des sècheresses entre 1945 et 2005 en Espagne se révèle éclairante. Elle montre que les bassins versants comportant le plus de barrages connaissent aussi plus de sécheresses en aval… Mais pas seulement. Les épisodes secs les plus sévères et les plus longs avaient lieu sur ces mêmes bassins dotés de nombreux barrages, avec parfois des kilomètres de petits cours d’eau mis à sec. Ces dégâts causés sont également soulignés par l’observatoire national des étiages3. Ces rudes sècheresses s'avèrent très liées aux volumes de consommation d'eau, qui ont augmenté ces dernières décennies.
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Sobriété, optimisation et juste partage : les préconisations du mouvement France Nature Environnement
Les conflits autour des barrages ont malheureusement de l'avenir. Derrière ces constructions, ce sont les questions du partage juste de cette ressource rare, du respect de la nature ou encore de notre adaptation au changement climatique qui se font sentir.
Face à la multiplication de ces retenues, France Nature Environnement :
- s’oppose fermement à la création de nouveaux barrages en travers des cours d’eau compte tenu des milliers déjà existants qui barrent la vie des cours d’eau, en cumulant de lourds impacts sur l’environnement. La priorité doit porter sur l’optimisation de leur utilisation. Tout financement public doit être définitivement exclu en faveur de ce type d’ouvrages qui ont le plus fort impact environnemental.
- prône une gestion plus sobre de la consommation en eau pour tous les acteurs et notamment la transition agroécologique des irrigants. Cette transition doit être fortement soutenue grâce à un accompagnement au changement qui permet une meilleure résilience de l’agriculture face à la crise climatique. Comment ? En développant des prairies, en préservant des éléments du paysage qui freinent le ruissellement des eaux (haies, bosquets, talus, mares, etc.), en diversifiant les cultures et leurs assolements ou encore en optant pour des cultures moins gourmandes en eau, plus robustes face au changement climatique.
- milite pour la désimperméabilisation des sols et de toute autre action favorisant l’infiltration naturelle des eaux de pluie en ville comme à la campagne : l’eau de pluie qui tombe en hiver a une utilité fondamentale, elle sert à recharger les nappes d’eau souterraines.
- demande la préservation systématique des milieux naturels, notamment aquatiques, et de leurs fonctionnalités.
- appelle à une gestion collective, publique et à gouvernance partagée par tous les usagers de l'eau. Notre fédération considère qu'il est indispensable de garantir une eau en quantité suffisante pour assurer le bon fonctionnement des milieux aquatiques et la sécurité de l’alimentation en eau potable, puis calibrer et satisfaire ensuite les autres usages humains (agricoles, énergétiques, industriels) de façon durable.
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