Préserver les forêts pour relever le défi climatique (03/01/2017)

Communiqué de Greenpeace le 03.01.2017

Nous ne pouvons pas nous passer des forêts pour relever le défi climatique. Derrière la protection des forêts, c’est bien la préservation de l’espèce humaine qui est en jeu – d’où l’importance d’atteindre l’objectif Zéro Déforestation.

Les forêts, championnes du climat.

Dans la mesure où elles constituent des puits de carbone importants et irremplaçables, les forêts régulent les équilibres climatiques. La destruction des forêts est responsable d’environ 25% des émissions mondiales de gaz à effet de serre : plus que tous les avions, voitures, camions, bateaux et trains de la planète réunis. La forêt absorbe en effet les émissions de CO2 comme une éponge. Elle capture le CO2 présent dans l’atmosphère via la photosynthèse et le stocke aussi bien dans le bois que dans les sols et tourbières.

Si les discussions en cours au niveau international se focalisent beaucoup sur les façons de renouveler notre système énergétique, afin notamment de parvenir à 100% d’énergies renouvelables le plus vite possible, ce n’est pour autant pas l’unique moyen de combattre le réchauffement climatique. Protéger les forêts doit être aussi une priorité absolue, parce qu’une forêt coupée contribue au dérèglement climatique, tandis qu’une forêt debout en atténue les effets.

Or les forêts primaires, à savoir celles qui sont encore indemnes de toute intervention humaine, ne peuvent être remplacées par des plantations : elles constituent un patrimoine écologique inestimable, accumulé par des siècles de vie naturelle. Le groupe spécial d’experts techniques sur la biodiversité et les changements climatiques (AHTEG) de la Convention sur la diversité biologique (CBD) souligne ainsi que : « les forêts primaires présentent généralement une densité en carbone, une diversité biologique et une résistance plus élevée que les autres écosystèmes forestiers, notamment les forêts naturelles modifiées et plantations. »

Une richesse naturelle menacée

Hélas, les forêts, et en premier lieu les forêt primaires, sont aujourd’hui menacées par l’exploitation forestière industrielle comme par l’agrobusiness. Aujourd’hui la forêt boréale, le plus grand puits de carbone terrestre mondial, est dégradée par une industrie forestière qui n’hésite pas à raser des parcelles entières pour récolter du bois, de même qu’elle souffre de la multiplication des feux de forêts liés à l’activité humaine.

Quant aux forêts tropicales (Amazonie, Bassin du Congo, Indonésie), elles sont attaquées d’un côté par le trafic de bois illégal, de l’autre par l’expansion des pâturages : l’élevage bovin est en effet responsable de 80% de la déforestation amazonienne, ce qui représente 14% de la déforestation annuelle de la planète. Pour finir, l’extension des plantations liées à l’agrobusiness, comme l’huile de palme, nécessitent le plus souvent de déboiser de vastes parcelles.

A titre d’exemple, la forêt indonésienne est régulièrement ravagée par des feux de forêts qui permettent de dégager, tout en les fertilisant, de vaste parcelles de tourbières afin d’y planter des palmiers à huile. Or, en 2015, les feux en Indonésie ont rejeté en quelques mois à peine plus de CO2 que l’ensemble du Royaume-Uni en une année.

GP03QYL_Medium_res_with_credit_line-640x427.jpg

Sans compter que le réchauffement climatiques fragilise les forêts, plus vulnérables aux incendies. Dans une étude publiée en octobre dernier par la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), des chercheurs américains estiment que le réchauffement climatique est le principal coupable de l’augmentation des superficies forestières réduites en cendre dans l’ouest des États-Unis. L’augmentation des températures est ainsi en cause dans la propagation et la durée sans précédent des incendies de forêts en Alaska, où près de 2,1 millions d’hectares ont brûlé en 2015, soit la deuxième plus grande superficie depuis le début des observations en 1940. Selon ces chercheurs, « le changement climatique induit par les humains pourrait avoir accru le risque de ces incendies pendant la saison des feux de 34 à 60% ».

Un cercle vicieux qui montre à quel point forêts et climat sont interdépendants.

(...)

Quel bilan pour la COP22 ?

En outre, cet automne 2016 se tenait à Marrakech la COP22, dont le mandat était de donner suite à l’Accord de Paris en concentrant les discussions sur les dispositifs d’action concrets à mettre en œuvre, notamment pour pouvoir mesurer la contribution effective de chaque pays à l’effort climatique international.

Même si la question de la préservation des forêts a encore eu (trop) peu de place dans les négociations officielles, il semble que l’attention globale portée à cet enjeu commence à grandir. Plusieurs événements parallèles y étaient dédiés. Plusieurs scientifiques ont pu souligner l’urgence de s’occuper plus concrètement de la sauvegarde des forêts pour combattre le réchauffement climatique. Et l’exemple du moratoire sur le soja en Amazonie, dont Greenpeace a été l’un des principaux artisans, a été mentionné comme une voie à suivre, notamment en ce qui concerne la collaboration du secteur privé et du secteur public dans la mise en place de politiques protectrices pour les forêts.

La COP22 a également produit son lot d’annonces. Parmi elles, un (énième) moratoire sur le déboisement des tourbières en Indonésie, une transformation du Code forestier brésilien ou encore un partenariat entre Google et la FAO pour la création de l’outil Collect Earth, outil open-source capable de produire des images satellite haute définition des forêts et de leur dégradation.

GP01YEL_Medium_res_with_credit_line-640x427.jpg

Notons également que la Tropical Forest Alliances (TFA), composée notamment de sept États africains (qui représentent à eux seuls 250 millions d’hectares de forêt tropicale – soit 13% environ du total mondial), a signé lors de la COP22 une déclaration dans laquelle ses membres s’engagent à protéger la forêt tropicale de l’exploitation d’huile de palme non durable.

Des progrès apparaissent donc peu à peu au niveau de la diplomatie environnementale. Pour autant, les quatre points suivants doivent être beaucoup plus sérieusement inclus dans les discussions climatiques internationales à venir :

1) Les secteurs fonciers et forestiers ont besoin d’un système d’évaluation indépendant, clair et transparent des émissions et retenues de CO2 qui leurs sont liés, afin de faciliter un ralentissement de la déforestation ainsi que la restauration des forêts et autres puits de carbone naturels.

2) Les pays en développement ont besoin d’un soutien nettement plus substantiel de la part du Fonds vert pour le climat, et des toutes les autres initiatives de compensations financières bilatérales.

3) Les contributions nationales à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (INDCs) sont aujourd’hui inadéquates en ce qui concerne les pays en voie de développement, et insuffisantes en ce qui concerne les pays développés. La science du climat le montre : ces INDCs doivent être revues à la hausse. Cette montée en ambition doit encourager les Etats à faire plus pour protéger les forêts.

4) Enfin, il est temps d’avancer franchement dans la reconnaissance officielle des droits fonciers des peuples autochtones, qui sont les premiers défenseurs des forêts.

GP0GAW_Medium_res_with_credit_line-640x426.jpg

18:04 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : greenpeace, déforestation, changement climatique | |  Facebook | |  Imprimer |