L'homme qu'a pas vu l'homme. (12/03/2016)
Marc Gaillot n'a pas connu Verlaine, et peut-être qu'il regrette de ne jamais avoir entendu la voix du poète ou partagé un verre (d'absinthe) avec lui. Arrivant par hasard (?) à Juniville en 1997, il remplace par accident (?) la guide du "musée" Verlaine, et vingt ans plus tard, il y est toujours présent. Il présente ces lieux, où résonne encore le souvenir de Verlaine, ces meubles qui ont été les siens et tous ces souvenirs iconographiques rassemblés au fil des années. De ces meubles et de ces souvenirs, Marc Gaillot en est plus que le gardien : il est celui qui traduit, pour le curieux de passage, les traces que Verlaine a laissées dans un discours aussi documenté que passionné.
Mais de traduction à trahison, il n'y a parfois qu'un pas. Et Marc Gaillot porte un regard critique (c'est un euphémisme) sur bon nombre de biographies du "prince des poètes". Il ne prétend pas détenir la vérité entière et définitive, mais il ébranle des certitudes maintes fois répétées et introduit le doute sur des interprétations jusque-là définitives.
C'est ainsi que sa récente conférence à l'invitation de l'ASPV s'intitulait "Verlaine et le doute verlainien"
Dans la salle bien remplie du CPR de Vouziers, les auditeurs sont tombés sous le charme de ce conteur qui parle sans notes, mais dont les paroles captivent l'attention comme une partition bien composé. Pourtant, Marc Gaillot a indiqué faire ce vendredi sa première présentation de sa conférence, ce ne sera sans doute pas la dernière.
Les personnes présentes ont découvert beaucoup d'aspects de la vie et de la personnalité de Verlaine, mais également, elles ont pu réentendre différemment les vers du poète à travers des explications fournies.
Nous ne pourrons résumer ici l'ensemble des informations données lors de la soirée. On retiendra cependant que Verlaine a été un poète très précoce, envoyant à l'âge de 14 ans à Victor Hugo un poème qui se termine par ces vers :
Mais, tout en dédaignant la mort et ses alarmes,
Hugo, tu t’apitoies sur les tristes vaincus ;
Tu sais, quand il le faut, répandre quelques larmes,
Quelques larmes d’amour pour ceux qui ne sont plus.
A travers cet exemple, et bien d'autres encore, le conférencier a parlé de Verlaine comme d'un "clown scientifique", déstructurant la construction classique pour user de la poésie comme d'une force ironique pour qui sait l'entendre.
De même, Marc Gaillot a remis les pendules à l'heure quant à la vie de Verlaine. Les relations avec sa mère s'éclairent d'un jour nouveau quand on connaît un peu l'histoire familiale (trois frères morts-nés ). De même, sa relation avec Rimbaud prend un autre éclairage quand on sait qu'il y a à peine 10 ans d’écart entre les deux.
Verlaine, poète maudit, cette image lui est trop souvent collée, alors que c'est lui qui a inventé ce concept en publiant les œuvres de Mallarmé, de Rimbaud, mais aussi de Pauvre Lelian (anagramme de Paul Verlaine).
Marc Gaillot serait capable de tenir une bonne dizaine de conférences sur Verlaine sur des thèmes différents, et tout laisse à penser qu'il pourrait y mettre la même fougue et la même force de conviction.
Paul Verlaine jeune homme, huile de Gustave Courbet.
Pour terminer, signalons que le Sud-Ardennes inspire toujours les poètes, voici un texte de Bruno Feucher (dit Bubune) publié en juin 2010 :
Auberge, aubaine
Braves gens, ajoutez de la poésie
Agrémentez vos égales journées
Et rendez vous compte, votre vie
Deviendra conte de fée
Humez les parfums d'antan d'Arthur
Parcourez donc ses sentiers
Sinueux, parsemés d'aventures
Enivrez vous d'errance, allez nus-pieds
Vers les paradis inexplorés
Dans l'encre couleur folie
Votre plus belle plume, trempez
De bien-être et légèreté, serez envahis
Ce n'est pas un doux rêve, mais aubaine
Hier je fus imbibé, ému, requinqué
Par l'auberge et les conteurs de Verlaine
A cet instant nul doute, vous me croyez ...
23:23 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : verlaine, juniville, vouziers, aspv, marc gaillot | | Facebook | | Imprimer |
Commentaires
Soirée très enrichissante qui nous a fait connaitre sous un autre visage Verlaine et son ami Rimbaud.
Merci au rédacteur de l'article qui a su si bien retranscrire ce que nous avons pu ressentir .
Écrit par : Jean-Pierre Daumont | 14/03/2016