Démocratie participative : un rapport pour la forme (03/06/2015)

Communiqué de la FNE

Aujourd’hui est remis à la ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal, le rapport de la commission Richard sur la démocratie participative en matière environnementale. Commandé suite la mort du militant Rémi Fraisseà Sivens, ce rapport était l’occasion de réfléchir à la façon d’impliquer les citoyens, le plus en amont possible des projets d’aménagement. Malheureusement les propositions restent timides.


De l’intérêt de développer la démocratie participative

Elle prendrait trop de temps selon certains acteurs, qui défendent l’allègement des procédures en particulier pour les projets privés. Le respect de l’intérêt général est-il une perte de temps ? Co-construire les projets peut au contraire permettre d’en gagner, en évitant les blocages à un stade avancé du processus.

Le taux élevé d’abstention lors des élections publiques traduit le désintérêt croissant d’une partie des citoyens à l’égard du fonctionnement de nos institutions. Le développement d’une démocratie participative peut contribuer à les impliquer de nouveau dans le débat démocratique. Ainsi, le renouveau de la démocratie participative a vocation à mieux s’articuler avec la démocratie représentative pour donner de la légitimité aux décisions prises.

Quelques avancées

Le rapporteur connaît la nécessité d’une concertation plus en amont, au moment où toutes les options, y compris celle de ne rien faire, sont encore ouvertes. Il propose notamment la possibilité pour des citoyens ou des associations de demander un débat pour un projet ne rentrant pas dans les seuils de débat obligatoire.

Cela est d’autant plus fondamental que les projets privés et publics, développant de l'emploi ou de l'activité, ne sont pas forcément d'intérêt général au regardde leurs impacts. La logique de "développement" qui motive la plupart des projets ne laisse pas de place aux questions d'utilité sociale et de bon usage des fonds publics.

Il souligne l’impératif de rendre systématiquement compte des suites de la participation pour la rendre crédible, afin de mettre un terme au règne actuel du « cause toujours ». Il pointe par ailleurs l’urgence d’une réforme de l’autorité environnementale en région , réclamée de longue date par FNE, et annoncée par Ségolène Royal.

Le rôle méconnu des associations

Les meilleures procédures environnementales ne pourront être efficaces que si des personnes sur le terrain s’en saisissent, les font vivre, y contribuent. Les associations de protection de l’environnement, qui regroupent des milliers de citoyens bénévoles, exercent une activité d’utilité sociale mais aussi d’intérêt général et n’ont très souvent pas d’intérêt financier dans les projets. Il est nécessaire de leur donner les moyens de jouer pleinement ce rôle, à la fois en créant un espace dans lequel s’exprimer, en leur fournissant les informations et formations pour le faire de manière pertinente, et en leur assurant un financement suffisant. La question de la reconnaissance et des moyens donnés aux associations qui agissent sur le terrain est évoquée à la marge.

La justice toujours plus lente que les bulldozers

Le troisième pilier de la démocratie environnementale c'est l'accès au juge, afin de permettre d'empêcher la corruption et de sauvegarder l'Etat de droit. Pourtant, le rapport ne propose aucune mesure concrète pour améliorer la possibilité de suspendre les travaux en cas de doute sérieux sur leur légalité.

Pour Bruno Genty, président d’honneur de FNE :« trop de projets sont annulés plusieurs années après leur mise en service, rendant le recours juridictionnel sans effet sur des dégradations irréversibles de l'environnement. On est dans les vœux pieux alors qu’on n’hésite pas à réduire les délais contentieux pour décourager le contentieux. Si rien ne bouge, les bulldozers iront toujours plus vite que la justice ! »

Quel avenir pour ce rapport ?

Si ce rapport contient quelques avancées, on peut se demander si elles deviendront réalité, quand on voit les reculs actuels du gouvernement en matière de démocratie : réduction des délais de recours annoncée ce lundi dans le cadre du choc de simplification, loi « renseignement » permettant la surveillance des militants, loi Macron et son lot de dérogations…

Pour Denez L’Hostis, président de FNE : « Ce rapport comporte certaines avancées mais reste trop flou sur les moyens de terrain. L’absence de reconnaissance du rôle des associations dans un contexte d'abandon financier et de réforme territoriale destructrice des mouvements locaux de citoyens risque de mettre à mal de la démocratie environnementale, faute de participants».

1Pour comprendre les enjeux de cette réforme, voir l’infographie de FNE : /fr/nos-actions/sivens/sursaut-democratique/autorite-envi...

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Sivens, après le passage des engins de chantier.

21:56 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : démocratie participative, grands projets, écologie, association | |  Facebook | |  Imprimer |