« On dit souvent, ici, qu’on entre au CHU par la porte principale, et qu’on en ressort par la morgue », lâche cyniquement Cédric. Il est aide-soignant à Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe. Sur l’île aux belles eaux, les médecins manquent – 354 pour 100 000 habitants, contre 437 à l’échelle nationale – et se concentrent sur Grand-Terre, plus urbaine et touristique. Les malades les plus fortunés privilégient les établissement privés, voire les transferts vers l’hexagone. Les autres, plus précaires, se rendent « à reculons » au Centre hospitalier de Guadeloupe (CHUG), épicentre d’une offre de soins dégradée. La bâtisse moribonde, située à Pointe-à-Pitre, pourrait d’ailleurs à elle seule illustrer la problématique des services publics outre-mer.
Soixante-cinq ans après que la Guadeloupe est devenue département français, la promesse faite aux Antillais d’une « égalité réelle », en droit et en situation, continue d’être déçue. Les services de base, surtout, ne sont pas honorés et les Guadeloupéens demeurent seuls face à un florilège de dysfonctionnements. Dans un rapport de sa délégation outre-mer, publié en janvier 2020, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) note « la persistance d’écarts importants dans l’accès aux services publics » comparée à l’hexagone, ce qui continue de nourrir « de fortes tensions et des frustrations ».