commercy pleure (18/06/2008)
la ville de Commercy fait partie des garnisons menacées de disparition . Voici un article tiré du "Monde" qui décrit la situation et les réactions locales .
COMMERCY (Meuse) ENVOYÉ SPÉCIAL
A Commercy, il y a les madeleines et le 8e régiment d'artillerie. Sur les premières, on peut discuter des goûts et des recettes. Mais personne ne transige sur la présence des militaires. "Non à la désertion du 8e RA", proclament des calicots dès l'entrée de cette ville de 7 000 habitants, située aux marches de la Lorraine.
André Lecointre, retraité de la SNCF et représentant local de la CGT, a encore en mémoire la réforme de la sidérurgie dans les années 1980. "A l'époque, 800 emplois ont été supprimés. On est venu nous voir trois fois pour nous promettre des compensations. Rien n'est jamais venu. Aujourd'hui, le taux de chômage avoisine les 11 %. Trefileurope, qui appartient au groupe Arcelor-Mittal, bat de l'aile, et les Madeleines Saint-Michel réduisent leurs effectifs. Cette réforme n'a pas de sens."
Les Commerciens trouvent la nation bien ingrate. Le département de la Meuse s'est voué à la cause militaire depuis la défaite de 1870 et l'annexion de la Moselle par l'Allemagne. Transformé en zone tampon, il a accueilli des casernes. Commercy se situe à mi-chemin entre Verdun et Domrémy, deux hauts lieux de la mémoire nationale. La présence du 8e RA remonte à 1963. Mais l'armée est présente dans la ville depuis le XVIIIe siècle, depuis que Stanislas Leszczynski a transmis la Lorraine à son royal beau-fils, Louis XV.
"Les militaires apprécient Commercy pour la qualité de la vie, témoigne Blandine Deumie, épouse de militaire. Beaucoup demandent à renouveler leur contrat. Certains achètent une maison à la campagne, dans les villages environnants. Ils apprennent à aimer la nature, la pêche." Dès 17 h 30, les soldats sortent en ville et font leurs courses en treillis. Ils font partie du paysage.
Malheureusement pour Commercy, la menace n'est plus à l'est. La Meuse a perdu son intérêt stratégique. Les élus font bloc pour demander des compensations. Pour le maire socialiste, Bernard Muller, "l'Etat se comporte comme un patron voyou". Il dénonce "des choix politiques". "Il faudrait que l'on m'explique pourquoi Toul conserve son régiment. Peut-être parce que c'est la circonscription de Nadine Morano, proche du chef de l'Etat ? Dans cette réforme, les élus de droite pourront mesurer leur influence aux résultats." Le député (UMP) Bertrand Pancher est à peine plus modéré. "La réflexion du ministère de la défense est complètement déconnectée de l'aménagement du territoire. Or la carte militaire, c'est beaucoup plus lourd en termes d'enjeux que la carte judiciaire ou la carte hospitalière. Les militaires réforment comme ils font la guerre. Ils tirent et ils détruisent tout de suite !"
"ON FAIT SAUTER LA BANQUE !"
Le parlementaire souhaite l'installation de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), soit environ 250 personnes. Un choix qui serait cohérent, selon lui, avec l'ouverture d'un laboratoire et d'un centre de stockage des déchets à Bure, dans la Meuse. Le foncier
libéré par le départ des militaires pourrait aussi être utilisé pour implanter des entreprises. Les élus espèrent la création de zones franches, axées sur les nouvelles technologies ou les métiers de la pâtisserie.
Bertrand Pancher n'hésite pas à brandir la menace. Il a constitué un groupe d'une quinzaine de parlementaires UMP. "Si l'on ne nous donne pas satisfaction, on fait sauter la banque à la prochaine loi de finances !" Le maire approuve cette fermeté. Il s'inquiète pour l'avenir. "Si ça continue, il ne va plus rester dans ce département que du stockage de déchets nucléaires, avec une réserve d'Indiens autour..."
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