Parc éolien du Mont des 4 Faux : une version finale un peu plus pâle (01/07/2017)

Avec 71 éoliennes de grande taille, le projet de parc du Mont des 4 Faux faisait partie des installations les plus importantes de ce genre. L'étude a commencé dès 2005, et en 2012 une première enquête publique avait donné un avis favorable. Mais un problème d'interférence avec un radar de l'armée de l'air a bloqué le projet pendant plusieurs années. Une solution a été trouvée pour remédier à cette difficulté, et les études ont repris avec un nouveau partenaire, EDF Energies Nouvelles.

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Une nouvelle enquête publique était alors nécessaire, elle s'est déroulée du 23 janvier au 24 février 2017. Les conclusions de cette enquête ont été publiées le 13 avril dernier, avec un avis défavorable. Cet avis n'est qu'indicatif, le Préfet des Ardennes a seul le pouvoir d'accorder ou non les permis de construire. Le 26 juin dernier, Pascal Joly, le Préfet des Ardennes a signé un arrêté autorisant l'installation de 63 éoliennes par la société "Parc éolien du Mont des 4 Faux".

Comment peut-on expliquer ce passage d'un projet flamboyant à 71 unités à une deuxième version plus pâlotte à 63 éoliennes ? Il faut se plonger dans le rapport de la commission d'enquête, dans la réponse du demandeur et dans l'arrêté préfectoral pour comprendre cette décision. Mais le rapport comporte 220 pages, la réponse du pétitionnaire en compte 558 (il donne une réponse à toutes les observations faites à l'occasion de l'enquête publique)  , et l'arrêté préfectoral tient en "seulement" 22 pages.

Peut-on résumer tout ceci en quelques lignes ? Il au moins possible d'essayer de le faire.

Que s'est-il passé entre 2012 et 2017 pour que l'enquête aboutisse à un résultat inverse ?

Le projet présenté n'a pas significativement varié pour ces deux échéances. La réglementation de son côté n'a pas non plus considérablement évolué. Par contre, les mentalités ont changé, sur le plan général et vis-à-vis des éoliennes en particulier.

Les arguments "officiels", venant d'en haut sont de plus en plus contestés. Des scandales répétés ont mis en évidence le peu de fiabilité de certaines expertises. Et le pas est vite franchi, qui fait rejeter tout argument scientifique, ou qui met sur le même plan une expertise validée et un avis isolé. Dans les remarques transmises à la commission d'enquête, il est souvent question du principe de précaution. Il est repris dans le sens "puisqu'on a pas la preuve qu'il n'y a pas de danger, il ne faut pas le faire". Dans ces conditions, l'ordinateur, le téléphone portable, le four à micro-ondes, ...,  n'auraient jamais vu le jour. La prudence peut imposer le retrait d'une innovation, si celle-ci n'a que peu d'intérêt et qu'il existe un doute sérieux sur ses effets.

La question financière  prend aussi une importance majeure. Elle concerne bien entendu le porteur de projet, mais également les collectivités concernées (communes, communautés de communes, département) et les particuliers. Dans ce domaine également, une défiance s'est installée de plus en plus au fil de ces dernières années. Il est écrit par certains contributeurs à l'enquête que la recherche de profit est le seul motif des porteurs du projet. Les entreprises du secteur libéral fonctionnent principalement pour obtenir une plus-value financière. A moins de changer radicalement de modèle économique, il nous faut bien admettre que les entreprises qui construisent des écoles, des hôpitaux, nous amènent le gaz ou la fibre optique font des bénéfices. Faut-il pour autant renoncer à ces équipements ?

A cette défiance vis-à-vis de la science et de la finance s'ajoute un rejet grandissant de la classe politique. Les élus locaux ne sont pas épargnés par ce phénomène. Le contexte national de rejet des "élites" qui n'y connaissent rien au terrain n'a jamais été aussi fort. On retrouve un avis qui souligne avec inquiétude que dans les réunions avec la population, des réponses étaient données à toutes les questions : cette personne y voyait une "mise en scène", une preuve du manque de sincérité de la démarche.

Le porteur de projet a cherché à communiquer assez largement, mais l'a-t-il fait dans les meilleures. Remarquons, par exemple, qu'à la date du premier juillet, aucun compte-rendu de la commission d'enquête ne figure sur leur site.

 

Notons enfin, et ce n'est pas le moindre des changements constatés, que le nombre d'implantation d'éoliennes s'est largement accru depuis 2012. Et qu'un effet de saturation se met en place dans les esprits. Les différents parcs éoliens semblent apparaître sans logique d'implantation territoriale, au fur et à mesure qu'un industriel trouve l'opportunité d'un emplacement. Ce manque de lisibilité et cette multiplication des éoliennes proches les unes des autres sont responsables d'une part importante du rejet constaté chez certains.

Un projet de cette ampleur pose bien entendu des questions, entraîne des changements importants pour des villages presque immuables au fil des années, et comporte des effets négatifs réels.

Les nuisances paysagères, l'aspect foncier, les aspects financiers, ..., méritent d'être examinés et débattus. Ils n'ont pas fondamentalement varié depuis 2012, date de la première enquête publique. Mais beaucoup d'éléments extérieurs se sont modifiés depuis, expliquant en grande partie les changements d'opinion.

Le Préfet et le porteur du projet ont été obligés de tenir compte des oppositions constatées. Les éoliennes qui posaient le plus de difficulté ont été retirées (dont les 3 de Machault). Les opposants les plus décidés ne se satisferont pas de ces modifications. L'arrêté préfectoral peut être attaqué au Tribunal Administratif. Attendons de voir dans ce cas ce que jugera le T.A., mais il semble difficilement concevable que celui-ci bloque totalement le projet sur des arguments généraux : cela reviendrait à stopper toute implantation d’éoliennes sur le territoire national.

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